Le plan d'austérité draconien entériné mercredi ne sera pas suffisant pour que l'Italie retrouve la confiance des marchés, estiment des économistes, et de nouvelles mesures s'imposent, en particulier pour relancer une croissance atone.
Le premier test ne se fera pas attendre: l'agence Moody's, qui envisage de dégrader la note du pays depuis mi-juin, va annoncer ces jours-ci sa décision après un examen attentif des mesures d'austérité et des perspectives de croissance.
Une dégradation serait un coup de semonce pour la péninsule dont la note n'a pas été abaissée depuis le début de la crise.
Pour Giuliano Noci, professeur d'économie au Mip, école de commerce de l'Université Politecnico de Milan, le constat est sans appel: le plan d'austérité de 54,2 milliards d'euros "ne suffira pas pour calmer les marchés".
L'objectif de l'équilibre budgétaire en 2013 fixé par ce plan est d'ailleurs déjà caduc, selon Chiara Corsa, économiste de la banque UniCredit. Alors que les perspectives économiques mondiales s'assombrissent, les prévisions de croissance du gouvernement sont trop "optimistes", et "s'il veut vraiment arriver à l'équilibre budgétaire en 2013, il faudra d'autres mesures" de rigueur, pronostique-t-elle.
Cercle vicieux, selon M. Noci, les hausses d'impôts contenues dans le plan de rigueur, et en particulier l'augmentation de la TVA, vont encore plus obérer la reprise.
Rome table sur 1,1% de croissance cette année. Mais même si le ministre des Finances, Giulio Tremonti, a indiqué mi-août qu'il ne révisait pas ce chiffre "pour le moment", il devrait le faire la semaine prochaine, selon les analystes. D'autant plus que Bruxelles a abaissé jeudi sa prévision à 0,7%.
La détermination de Silvio Berlusconi, empêtré dans un nouveau scandale et dont la popularité est au plus bas, et de son gouvernement est par ailleurs remise en question par les investisseurs.
Alors que la mise au point du plan a donné lieu à des atermoiements pour tenter de contenter une majorité divisée, "le marché se demande: comment arriveront-ils à le mettre en oeuvre ?", souligne Chiara Corsa.
Afin de mettre fin à la crise de confiance, la relance de la croissance est donc le chantier le plus urgent. "Ce mal doit être attaqué avec une thérapie de choc", ont martelé jeudi les économistes de l'organisation patronale Confindustria.
Le gouvernement, qui avait promis en août, sous la pression du patronat et des syndicats, l'adoption d'un pacte pour la croissance d'ici fin septembre, s'y attelle. Simplifications administratives, déblocage de chantiers d'infrastructures, libéralisations font partie des mesures qui devraient être annoncées très prochainement.
Mais économistes et chefs d'entreprises doutent de son ambition.
"Tout le monde sait ce qu'il faut faire mais il n'y a pas de courage politique", regrette Giuliano Noci, appelant le gouvernement à réformer un marché du travail "sclérosé" et à régler l'"énorme problème de la bureaucratie qui dissuade l'investissement".
"Les délais ont expiré. Il ne faut plus faire des +spots+ pour contenter une partie de l'électorat mais (...) des réformes profondes. Sinon le gouvernement aura une responsabilité gravissime", a lancé la "patronne des patrons" Emma Marcegaglia.
Au-delà de la réduction du déficit public et de la relance de la croissance, les appels se multiplient également pour tailler directement dans l'énorme dette publique de 1.900 milliards d'euros (environ 120% du PIB).
La proposition de Massimo Corsaro, député du parti de Berlusconi, de réduire la dette de 400 milliards, grâce à un impôt sur le patrimoine et des privatisations, pour la faire baisser à 90% du PIB, est soutenue par plusieurs élus.