La flambée des actions des grandes entreprises a dopé la Bourse de Tokyo depuis le début de l'année, mais les meilleurs investissements sont désormais à placer dans de petites sociétés inconnues hors du Japon, indiquent des analystes.
Les géants de l'industrie comme Sony et Toyota ont bien profité de la politique d'assouplissement monétaire inspirée par le Premier ministre Shinzo Abe qui a entraîné une forte dépréciation du yen, précipitant un déferlement de capitaux étrangers sur la place tokyoïte dédaignée pendant plusieurs années.
L'action du fabricant d'électronique, qui était tombée très bas, a quasi doublé ces derniers mois, et celle du constructeur d'automobiles a grimpé de plus de 50%, tandis que l'indice Nikkei qui regroupe les 225 valeurs vedettes de la cote a bondi de 35% depuis le mois de janvier.
La baisse du yen élève les revenus et profits tirés de l'étranger par les groupes japonais, lorsqu'ils les convertissent en monnaie nippone. Les résultats financiers trimestriels des poids lourds de la cote, attendus à partir de cette semaine, devraient une fois de plus le confirmer.
Mais la montée parfois irrationnelle des indices fait aussi courir le risque d'une sévère correction. Le Nikkei s'était en réalité élevé de 50% entre janvier et mai avant de reperdre du terrain. Aussi certains opérateurs préfèrent-ils éviter désormais les grands noms pour se pencher sur des firmes moins reconnues mais plus prometteuses en terme de retour sur investissement.
"L'assouplissement monétaire a d'abord dopé les actions des grosses capitalisations, en conséquence de quoi les titres des entreprises plus petites apparaissent sous-évalués", explique Shun Maruyama, courtier chez BNP Paribas Securities à Tokyo. "Les investisseurs étrangers voient maintenant les petites comme de nouvelles pépites."
Les actions de certaines ont d'ailleurs déjà tiré des gains significatifs de leur apparition sur les radars. Les titres du détaillant à bas prix Don Quijote ont doublé de valeur depuis janvier, ceux du laboratoire SymBio Pharmaceuticals ont gagné 67% et ceux du fabricant de condiments Pickles 85%.
Contrairement aux grands groupes actifs à l'étranger, les firmes d'envergure plus modeste sont peu dépendantes des fluctuations des taux de change, ce qui contribue à les rendre attractives. Elles pourraient bénéficier en outre de l'augmentation de la consommation intérieure que la politique du conservateur Abe veut relancer coûte que coûte.
Le secteur des infrastructures doit en particulier bénéficier de la poursuite des travaux de reconstruction du nord-est dévasté par le tsunami du 11 mars 2011, ainsi que de l'attribution des Jeux olympiques de 2020 à Tokyo.
Nombre d'experts tablent aussi sur les firmes oeuvrant dans les activités d'assistance aux personnes âgées, au moment où la proportion des plus de 65 ans atteint un quart de la population japonaise, un ratio appelé à augmenter à cause d'un faible nombre de naissances.
De façon générale, les investisseurs étrangers étaient moins présents sur la place tokyoïte depuis la crise financière de 2008-2009. Mais le mouvement semble s'être inversé cette année, avec près de 100 milliards de dollars placés depuis l'étranger à la Bourse de Tokyo entre janvier et septembre. Cela représente plus du triple des investissements enregistrés en 2011 et 2012, d'après des données fournies par les autorités boursières.
Toutefois, cet intérêt ne perdurera évidemment que si ces capitaux frais sont utilisés habilement. "Le plus important pour ces entreprises, quelle que soit leur taille, sera de transformer cette bonne passe conjoncturelle en une croissance durable dans les années à venir", prévient Masahiro Fukuda, de FIL Investment Japan. "Le véritable test pour les investisseurs et les entreprises est devant nous."