Première productrice de volailles en Europe, la filière avicole française subit une érosion depuis quelques années, pâtissant à la fois de la concurrence internationale et de la progression des importations dans l'Hexagone.
Le redressement judiciaire du volailler breton Doux en juin a pointé les difficultés de l'aviculture qui emploie près de 50.000 salariés et 15.000 éleveurs, selon l'Association pour la promotion de la volaille française.
Dans un marché mondial en croissance (+3%), la production française a progressé de 2,3% en 2011, à 1,86 million de tonnes, selon des données provisoires de l'organisme officiel FranceAgrimer publiées en mars.
Mais en 10 ans, elle a reculé de 20%, selon le ministère de l'Agriculture, notamment en raison de la concurrence d'autres pays comme le Brésil, les Etats-Unis, la Thaïlande, l'Allemagne ou le Royaume-Uni.
Pourtant tournée vers l'export, la filière "ne profite pas du dynamisme qui caractérise la production et la consommation mondiales de volailles", en pleine expansion, déplore la Confédération française de l'aviculture (CFA) dans une note.
En 2011, le solde des échanges de viande de volailles avec le reste du monde, s'il reste positif, est d'ailleurs "plus de quatre fois inférieur à son niveau de 2001", indique FranceAgrimer.
Le marché national patine aussi. En 2011, la consommation des ménages de viandes et de produits élaborés de volailles a reculé de 1,6%, selon FranceAgrimer.
Et pour la viande de poulet, elle dépend à 42% des importations.
En dix ans, les importations de viande de volailles en provenance de l'Union européenne ont été multipliées par plus de deux et depuis quelques années, la France accuse même un déficit commercial avec l'UE, selon FranceAgrimer.
La filière française a développé une offre très segmentée et tournée vers des produits spécifiques à haute valeur ajoutée - bio, Label Rouge...- répondant ainsi à une partie de la demande nationale.
Mais "notre filière rencontre des difficultés sur les produits d'entrée de gamme qui représentent 65% de la consommation française de volaille", explique à l'AFP Michel Prugue, président de la CFA.
Investir
"La grande distribution trouve chez des fournisseurs allemands et hollandais des produits de grande série et on laisse la segmentation du marché aux entreprises françaises", poursuit-il.
Une situation dont pâtissent certains sites d'abattage, comme ceux du volailler Doux, qui ne fonctionnent plus au maximum de leur capacité.
"Il faut que la filière continue à bien maîtriser sa diversité d'espèce et de gamme mais il ne faut pas abandonner l'entrée de gamme et l'export", souligne M. Prugue.
La CFA insiste sur la nécessité d'investir, les bâtiments d'élevage ayant un âge moyen "de plus de 22 ans", selon sa note.
"Les industriels ont un gros besoin de restructuration", souligne par ailleurs Jean-Michel Choquet, éleveur et président du Centre régional avicole (Cravi) Bretagne. "L'avenir de la production française, c'est surtout le marché intérieur", insiste-t-il.
La question de la restructuration du secteur s'est posée avec la mise en vente de Doux. Pour l'heure, le tribunal de commerce de Quimper a prolongé la période d'observation du groupe jusqu'en novembre, sauf le pôle frais mis en liquidation et pour lequel de nouvelles offres peuvent être déposées avant le 10 août.
"On a bien les limites d'un système", souligne de son côté Philippe Collin, porte-parole de la Confédération paysanne. "Méfions-nous des grandes concentrations", prévient-il, encourageant la mise en place d'"outils qui permettent de développer des filières de qualité".
Autre facteur défavorable: la hausse des prix des matières premières agricoles, qui augmente les coûts de production des éleveurs, s'est confirmée cet été.
Dans ce contexte, la croissance de la production devrait être "plus limitée en 2012", notamment à destination du marché français, et les "exportations moins dynamiques qu'en 2011", selon FranceAgrimer.