La création de près de 110.000 emplois salariés l'an dernier n'a pas suffi à endiguer la montée du chômage, sujet de préoccupation majeur pour Nicolas Sarkozy qui a annoncé vendredi un train de mesures en faveur des jeunes et des chômeurs de longue durée.
L'emploi salarié a progressé de 0,7% en 2010 dans les secteurs marchands, selon des données provisoires officielles.
Pourtant, le nombre des demandeurs d'emploi n'ayant exercé aucun emploi a progressé de 80.000 en 2010, atteignant 2,725 millions fin décembre.
L'explication est en partie démographique: "En France, chaque année en moyenne 800.000 jeunes arrivent sur le marché du travail pour seulement quelque 650.000 seniors qui en sortent, soit une différence de 150.000", souligne Eric Heyer de l'OFCE (Observatoire français des Conjonctures économiques). "Il faut plus de croissance pour absorber les jeunes" arrivant sur le marché du travail.
En outre, l'essentiel des emplois créés sont des emplois intérimaires, dopés par des mesures ponctuelles comme le boom dans l'automobile grâce à la prime à la casse, selon lui. "On passe à des plans d'austérité, les créations d'emplois risquent de ne pas perdurer".
La situation s'est particulièrement dégradée pour les 1,5 million de chômeurs de longue durée, avec ou sans activité réduite, ainsi que pour les jeunes.
Jeudi soir, le président Sarkozy a annoncé le déblocage de 500 millions d'euros supplémentaires en faveur de ces deux catégories. Cette somme devrait servir à proposer une formation à tous les chômeurs de longue durée et financer 50.000 nouveaux contrats aidés, qui s'ajouteraient aux 390.000 déjà prévus.
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a appelé vendredi les départements à "relever le défi" avec le gouvernement en cofinançant avec l'Etat 60.000 autres contrats aidés en faveur des allocataires de RSA.
"Le contrat aidé n'est pas la panacée mais en période de crise c'est mieux que le chômage", a réagi Olivier Ferrand, le président de la fondation Terra Nova, proche du PS, estimant leur nombre encore insuffisant, d'autant que les jeunes ont été "les principales victimes" de la crise qui a détruit un million d'emplois en un an et demi.
M. Sarkozy a également préconisé un système de "bonus malus" pour inciter les entreprises à embaucher des apprentis, avec pour objectif de porter leur nombre à un million, à une date non précisée, soit un quasi-doublement par rapport aux quelque 550.000 apprentis actuels.
Les syndicats, qui mènent leur propres négociations avec le patronat pour aider l'accès à l'emploi des jeunes, sont restés sceptiques sur ses propositions.
"Le magicien devra être habile pour bien atténuer le tour de passe-passe qui consiste à faire sortir les chômeurs des statistiques en leur proposant des contrats aidés, des formations ou un accompagnement renforcé sans donner de moyens supplémentaires à Pôle emploi!", s'est exclamée la CFE-CGC.
Laurent Berger, de la CFDT, dénonce "une politique de stop and go, pas lisible", ajoutant: "Que l'Etat embauche des apprentis dans la fonction publique et là on aura peut-être le million d'apprentis".
Pour sa part, le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, a jugé "pas inutiles" les nouveaux contrats aidés mais noté que l'on n'en reviendrait pas pour autant au niveau de 2010, le gouvernement ayant "fortement réduit" leur nombre "pour des raisons budgétaires".
Mais Jacques Voisin, de la CFTC, s'est demandé si "les emplois proposés permettraient (aux chômeurs de longue durée) de s'éloigner durablement de la précarité" et a jugé "largement insuffisants les budgets alloués".