PARIS (Reuters) - Le Bureau national (BN) du Parti socialiste a rappelé mardi à l'ordre les "frondeurs" hostiles à la politique du gouvernement sans pour autant sanctionner ceux qui projetaient de rejeter la loi "Macron", adoptée en force la semaine dernière.
Une résolution "un peu fourre-tout, comme la loi Macron" selon une formule de l'élu Jérôme Guedj, a été adoptée par le BN, qui donnera désormais des consignes de vote sur les textes de loi importants, après audition du gouvernement.
Les élus devront respecter ces consignes sous peine de se voir soumis aux sanctions prévues par les règles du parti, qui vont du blâme à l'exclusion.
"L'idée était de sortir par le haut des difficultés que nous avons rencontrées la semaine dernière", a dit devant la presse le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis.
Cette mise au point effectuée, "il n'y aura plus de vote contre" au Parlement, a-t-il espéré, même si rien ne peut le garantir formellement.
Cette clarification sera mise à l'épreuve lors de l'examen des futurs projets de loi, à commencer par celui sur le dialogue social que le ministre du Travail François Rebsamen, présent au BN, espère faire adopter avant l'été.
Le Bureau national, instance dirigeante du parti majoritaire, s'est réuni dans un contexte de forte tension entre l'aile gauche du PS et le gouvernement de Manuel Valls, à un mois des élections départementales et quatre mois du congrès du PS prévu début juin à Poitiers.
Jean-Christophe Cambadélis a demandé à ses troupes "se ressaisir" au sein d'une gauche "plus divisée que jamais".
Votée une semaine après l'adoption sans vote de la loi sur la croissance et l'activité, dite "loi Macron", la résolution du BN souligne que "le manque de respect, de fraternité ou tout simplement de camaraderie a atteint un niveau intolérable."
"Aucun responsable ne peut s'émanciper des statuts et des règles collectives", ajoute-t-on.
MONTEBOURG DÉNONCE UNE POLITIQUE "SUICIDAIRE"
Jean-Christophe Cambadélis a dit espérer une "discussion loyale" sur la "loi Macron" avant son passage en deuxième lecture à l'Assemblée nationale.
Manuel Valls a eu des mots durs contre les frondeurs qu'il a jugés "irresponsables" et "immatures" de menacer un texte considéré comme crucial pour réformer l'économie française, notamment en augmentant le nombre de dimanches travaillés.
François Hollande a quant à lui appelé samedi la majorité socialiste à la "responsabilité" et à la "lucidité" en vue des prochaines réformes qu'elle sera appelée à voter.
Pour le sénateur socialiste Luc Carvounas, proche du Premier ministre, les frondeurs ont "franchi le Rubicon".
Pour autant, "n'attendez pas nous une scission", a-t-il dit à la presse devant le siège du PS.
Six Français sur dix estiment que le PS est menacé d'implosion, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien et iTELE.
Le député européen Emmanuel Maurel, tenant de l'aile gauche du PS, a déploré les comportements de "maître d'école" du Premier ministre. "On ne dirige pas un pays à coup de menton ou un parti à coups de martinet", a-t-il dit aux journalistes. "On n'arrive pas à être d'accord car on s'est éloigné considérablement de ce sur quoi on s'était engagés en 2012".
Les "frondeurs" dénoncent des mesures comme l'extension du travail dominical et la politique de réduction du déficit qui, selon eux, aggravent le chômage.
Lundi soir, ils ont reçu le soutien d'Arnaud Montebourg, qui a jugé "suicidaire" la politique de François Hollande.
L'ancien ministre du Redressement productif, discret depuis son départ du gouvernement en août dernier, est sorti de son silence en marge d'une conférence donnée à l'université américaine de Princeton (New Jersey).
"Si on continue sur cette politique suicidaire -- et je lance un appel solennel aux dirigeants politiques européens, au président de la République, au Premier ministre, de cesser ces erreurs de politique économique --, nous finirons le quinquennat avec 800.000 chômeurs de plus", a-t-il dit à la presse, dans des déclarations transmises par les médias. "Donc, c'est le Front national au bout du chemin. Voilà ce qui se prépare."
(Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)