Après un an de controverses, le Conseil des ministres a examiné mercredi le projet de transformationde La Poste en société anonyme à capitaux publics début 2010, avant son passage devant le Sénat en octobre, mais les protestations des syndicats et de l'opposition restent vives.
La ministre de l'Economie Christine Lagarde s'est voulue rassurante: le gouvernement "n'est pas en train de liquider" La Poste, a-t-elle souligné.
Il veut "garantir à 100% la poursuite (de son) caractère public", a renchéri son collègue de l'Industrie Christian Estrosi, qui a promis d'être "personnellement particulièrement attentif" au statut des fonctionnaires et au régime de retraite des salariés de droit privé.
Ces déclarations n'ont pas suffi à apaiser les syndicats, qui multiplient les manifestations depuis un an car ils craignent une privatisation.
"Ce projet est une faute en soi", a martelé FO dans un communiqué, tandis que la CGT a appelé à un référendum constitutionnel et à une journée de manifestations en septembre.
Le Comité national contre la privatisation de La Poste, regroupant partis, associations et syndicats, en a profité pour lancer sa campagne pour une consultation nationale le 3 octobre, invitant les Français à donner leur avis.
"Le peuple s'exprimera librement par ses parlementaires" qui examineront le texte cet automne "et sera beaucoup plus largement représenté que par le nombre de gens qui répondront à la consultation", a commenté M. Estrosi, lors d'un entretien avec l'AFP.
L'opposition a réitéré son refus d'un nouveau statut: le "maintien d'un haut niveau de service public" est "à nos yeux remis en cause" par cette réforme, a déclaré le porte-parole du Parti socialiste Benoît Hamon.
A ces contestations s'est ajoutée mercredi une controverse sur la nécessité ou non de changer ce statut.
Ce projet "émane d'une décision européenne de 1997, validée par le gouvernement socialiste de l'époque, qui ouvre (le secteur) à la concurrence à partir de 2011", a déclaré en début de matinée M. Estrosi sur France Info. "Donc, c'est une obligation pour le gouvernement de s'y conformer".
Un argument réfuté par Benoît Hamon: "Faux! Absolument faux! Et c'est un mensonge!", a-t-il lancé sur Europe 1."La directive européenne prévoit la mise en concurrence, elle ne prévoit absolument pas le fait que l'on doive privatiser la Poste. Il n'y a aucun article de la directive européenne qui concerne le statut de la Poste au sens où il faudrait la faire passer de statut public à une société anonyme".
Même position chez FO: "déchoir la Poste de son statut d'établissement public ne correspond ni à une obligation européenne, ni à une nécessité économique et encore moins à impératif social".
Lors de son entretien avec l'AFP, M. Estrosi a ensuite modéré ses propos: "ce n'est pas une obligation, c'est une conséquence": "s'il n'y avait pas de concurrence, il n'y aurait pas besoin de s'adapter" et, dans ces conditions, changer le statut est "le choix le plus performant".
Le projet de loi comporte deux volets: l'un transposant cette directive européenne, l'autre définissant le nouveau cadre de société anonyme à capitaux publics.
Ce deuxième volet n'est pas une obligation légale, mais le président de La Poste Jean-Paul Bailly a souvent répété que pour affronter ses futurs concurrents, La Poste avait besoin de nouveaux capitaux et que cela passait par un changement de statut.
Cette réforme permettra en effet une augmentation de capital de 2,7 milliards d'euros, souscrite à hauteur de 1,2 milliard par l'Etat et de 1,5 par la Caisse des dépôts (CDC).