Le Fonds monétaire international (FMI) a ouvertement affirmé lundi que la Grèce ferait défaut sur son énorme dette en cas de nouveaux retards dans son plan de rigueur et de privatisations, alors qu'Athènes avait un rendez-vous crucial le jour même avec ses créanciers.
Le coup de semonce a été lancé par le représentant permanent du FMI en Grèce, Bob Traa, lors d'une conférence économique près d'Athènes.
"Les privatisations ont pris du retard par rapport au programme car les hommes politiques ne peuvent pas se mettre d'accord sur la façon de procéder", a-t-il dit en référence au programme de privatisations de 50 milliards d'euros d'ici 2015 auquel la Grèce s'est engagée.
"Si vous attendez encore (...) le pays ira au défaut", a-t-il averti, relayant un scénario du pire qui affole les places financières.
S'exprimant après le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, M. Traa a aussi renvoyé à 2013 le retour du pays à la croissance, tablant sur une récession de -5,5% en 2011, et de -2,5% en 2012.
Il a appelé la Grèce à "des mesures supplémentaires (...) pour réduire le déficit budgétaire", face au dérapage des comptes.
Le ministre grec s'est engagé en réponse à corriger les "retards" du pays et à accélérer les réformes auxquelles le pays s'est engagé en échange de son sauvetage de la faillite par la zone euro et le FMI depuis mai 2010.
C'est ce message qu'il doit réitérer lors d'une téléconférence prévue à 16H00 GMT avec les chefs de mission de la troïka, représentant la Commission et la Banque centrale européennes ainsi que le FMI, auprès de qui il compte obtenir le déblocage de la prochaine tranche de prêts internationaux, 8 milliards d'euros -vitaux pour le pays- d'ici fin octobre.
"Il nous faut prendre maintenant des décisions de caractère historique, sinon, nous serons obligés de les prendre prochainement dans des conditions incontrôlables et douloureuses", a insisté le ministre, évoquant lui aussi le risque d'une cessation de paiement du pays.
"Oui, il y a du personnel en excédent" dans le secteur public, a-t-il notamment lancé, alors que le gouvernement socialiste a toujours ajourné des réformes auxquelles s'opposent sa base électorale et syndicale.
M. Traa a également cité une réforme urgente de l'administration fiscale. Il a mis en garde contre trop de recours aux augmentations d'impôts, après l'annonce en catastrophe la semaine dernière de la création d'une taxe exceptionnelle sur l'immobilier, censée rapporter 2 milliards d'euros.
M. Vénizélos a néanmoins estimé qu'Athènes ne devait pas servir de "bouc émissaire" face au "manque de compétence dans la gestion de la crise de la dette" en zone euro.
En matière de privatisations, il a aussi relevé qu'il revenait "à la communauté internationale" de "faire des offres valables aux propositions grecques" de cessions.
A Bruxelles, la Commission européenne n'a pas relayé l'exigence de mesures additionnelles exprimé par M. Traa, mais a maintenu la pression. "Nous ne demandons pas plus que ce qui a été accepté dans le cadre du programme (négocié) pour la Grèce, il n'y a pas de nouvelles mesures d'austérité sur la table, ce qui est sur la table c'est le plein respect des objectifs fixés", a déclaré son porte-parole pour les questions économiques, Amadeu Altafaj
Les médias grecs tablaient sur un nouvel effort à livrer, à hauteur de quelque 4 milliards d'euros pour 2011 et 2012. Sont notamment évoquées l'instauration d'un plafond aux pensions de retraites et de nouvelles suppressions de postes dans les organismes para-publics.
Les chefs de mission de la troïka avaient suspendu au début du mois leur audit du suivi du plan grec de redressement en raison du manque de progrès sur les réformes de fond, des privatisations à la libéralisation du marché du travail, que sur l'assainissement budgétaire.
Aucun déblocage n'est depuis intervenu, la zone euro ayant au contraire réitéré vendredi en Pologne qu'elle conditionnait toute poursuite de l'aide à des avancées d'Athènes.
C'est l'aveu début septembre par la Grèce qu'elle ne tiendrait pas l'objectif promis de réduire son déficit public à 7,6% du PIB en 2011 qui a mis le feu aux poudres.
Le dérapage résulte de l'aggravation de la récession sous le coup de l'austérité, mais aussi de l'incapacité de l'appareil d'Etat grec à encaisser les rentrées fiscales et à réduire suffisamment ses dépenses.
Les divisions de la zone euro sur le dossier grec et la crise de la dette souveraine ont fait à nouveau plonger les Bourses européennes lundi, les valeurs bancaires étant particulièrement malmenées.