Terrena, un des premiers groupes coopératifs français, veut lancer en France une filière "Lupin", du nom de cette "graine miracle" capable de remplacer le soja dans l'alimentation animale mais aussi de se substituer dans l'alimentation humaine partiellement aux œufs ou aux matières grasses, le tout sans gluten.
"Nous voulons doubler la surface de culture dès 2014", a annoncé lors de la présentation d'un champ de lupins en Loire-Atlantique à la mi-juin Philippe Marquis, responsable de la filière Lup'ingrédients pour Terrena. Il s'agit de passer dans un premier temps à 5.000 ha de cette protéagineuse.
Après une dizaine d'années d'expérimentation pour sélectionner les graines les mieux adaptées au climat des agriculteurs adhérents de Terrena (un gros quart nord-ouest de la France), mettre au point une usine de transformation, un cahier des charges de la culture optimale, tout semble prêt.
Y compris, chose rare, une filière où la demande est déjà deux fois supérieure à l'offre et où la rémunération des agriculteurs qui acceptent de franchir le pas - 400 euros à la tonne, soit sensiblement autant que le colza ou le soja - est très attractive.
"Nous souhaitons nous développer de façon raisonnable pour éviter une surproduction de matière première qui casserait les prix de rémunération des agriculteurs: nous ne voulons développer que ce qui correspond aux débouchés trouvés", explique Philippe Marquis.
"Actuellement la production, avec 250 producteurs pour 2.500 hectares, ne couvre que 40% des débouchés, nous avons besoin de trouver de nouveaux producteurs", explique-t-il.
Le lupin contient 40% de protéines, comme le soja, mais "ce n'est en aucun cas une culture transgénique, à la différence du soja", souligne Yoann Goubaud, agriculteur de la commune de Couffé (Loire-Atlantique) sur l'exploitation duquel a lieu la présentation.
"protéines de terroir"
Il ne tarit pas d'éloges sur cette plante qui permet de produire des "protéines de terroir", et qui, en tant que légumineuse, synthétise l'azote de l'air et le laisse dans le sol, après l'avoir fissuré grâce à sa racine pivot, favorisant l'enracinement de la culture suivante.
Une plante qui ne nécessite en outre, une fois sa culture maîtrisée, que très peu d'intrants (engrais, traitements, etc.) par rapport à ses concurrentes.
Dans le champ de M. Goubaud plusieurs parcelles, différemment cultivées, montrent des lupins en fleurs: seuls, associés au blé en mélange ou bien en alternance de lignes. C'est cette dernière méthode qui emporte les suffrages de M. Goubaud en terme de rendement.
Contrairement au lupin des jardins d'ornement qui présente de longues grappes de fleurs colorées dressées vers le ciel, le lupin destiné à l'agriculture se montre plus arbustif et les grappes de fleurs - blanches dans ce cas - sont nettement plus modestes.
Une fois les fleurs fanées, des cosses duveteuses contenant plusieurs graines, rondes et aplaties en leur centre, font leur apparition sur les étages successifs de la plante.
La récolte, puis le tri lorsque la plante est assortie au blé, se font sans difficulté du fait des tailles différentes: le grain de blé est trois fois moins grand que la fève de lupin.
Dans une usine spécifiquement aménagée par Terrena, le lupin est transformé en farine, en pépites ou en poudre de protéines. Terrena assure notamment l'absence totale de contamination au gluten, car le lupin permet de remplacer avantageusement la farine de blé, avec plus de goût et de couleur que d'autres succédanés, pour les personnes intolérantes au gluten.
Outre les alimentations animales et humaines, le lupin pourrait en outre bénéficier d'un troisième champ de développement: les coques de ses graines présentent une importante concentration en "lupeol", un actif de plus en plus utilisé en cosmétique pour ses propriétés bénéfiques pour la peau.