Avec 6,4 millions de patients traités, les traitements contre le cholestérol représentent un gisement important d'économies, jusqu'à 500 millions d'euros par an selon l'Assurance maladie, mais les médecins prescrivent encore trop souvent le médicament plus cher.
Les remboursements de médicaments ont connu en 2012 une baisse "inédite" (-0,8%), a annoncé l'Assurance maladie mercredi lors d'un point de presse.
Et ce recul pourrait s'accélérer avec une meilleure pratique de prescriptions d'anti-cholestérol. "Nous avons un potentiel d'économies majeur de 500 millions d'euros par an", a déclaré le directeur de la Cnam (Caisse nationale d'assurance maladie), Frédéric van Roekeghem.
Les statines, molécules anti-cholestérol, ont représenté 1,2 milliard de remboursements en 2012.
L'une d'elles, la rosuvastatine, commercialisée sous le nom de Crestor et la plus coûteuse des anti-cholestérol, est pourtant prescrite une fois sur trois.
Son coût pour la Sécu est important: en 2012, le Crestor arrive en troisième position parmi les médicaments, en terme de montants remboursés (338,1 millions d'euros).
Une étude menée par la Cnam auprès de 163.801 patients suivis pendant trois ans, a permis de comparer son efficacité avec celle de la simvastatine, moins coûteuse et disponible sous forme de générique.
Or, les résultats ne montrent "pas de différence significative d'efficacité sur la morbimortalité" (mortalité due à la maladie).
Par ailleurs, la France est "très en décalage par rapport aux autres pays européens" sur ce point, a souligné M. van Roekeghem.
Dans sept d'entre eux (Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Italie, Finlande, Norvège, Espagne), la place de la rosuvastatine est en effet minoritaire: 7,8% des volumes en moyenne, seulement 3,9% au Royaume-Uni et 0,5% en Allemagne.
Au contraire, la simvastatine représente 68,5% des volumes au Royaume-Uni et 82,5% en Allemagne contre seulement 16,4% en France.
Selon le professeur Hubert Allemand, médecin conseil national, les raisons sont "culturelles" car les médecins français "préfèrent prescrire les produits les plus récents (comme la rosuvastatine) alors qu'ils n'ont pas forcément d'avantages par rapport aux autres".
Améliorer la prescription
M. Allemand a également souligné la présence "très forte des industriels auprès des professionnels de santé".
"Nous pouvons améliorer la prescription de statines dans notre pays sans nuire en aucune façon à la qualité des soins", a-t-il assuré.
"A-t-on les moyens de se payer plusieurs centaines de millions d'euros de dépenses sans qu'il y ait un bénéfice de santé avéré?" s'est interrogé de son côté M. van Roekeghem.
La rémunération sur objectifs des médecins mise en place en 2012, comporte déjà un volet sur les statines, pour encourager les praticiens à améliorer leurs prescriptions mais "ce n'est pas suffisant", a estimé le directeur de la Cnam.
Toutefois, les volumes d'anti-cholestérol prescrits, qui avaient fortement augmenté au début des années 2000, ont tendance à se stabiliser, avec une croissance de 3,8% en 2012.
Les montants remboursés ont même diminué de 6,7% en 2012, reflétant de manière générale la baisse des dépenses de médicaments constatée l'année dernière.
En effet, en 2012, les remboursements de médicaments de ville s'élèvent à 22,66 milliards d'euros contre 22,84 milliards d'euros en 2011.
Selon la Cnam, trois facteurs expliquent ce recul: la baisse des volumes, la baisse des prix ainsi que l'augmentation de la substitution par les génériques, moins chers.
Le taux de substitution s'élève à 83,6% fin 2012, contre 71,7% en avril de la même année, ce qui a permis de réaliser 1,5 milliard d'euros d'économies.