Les Bonnets rouges sont de retour dans la rue samedi à Carhaix (Finistère) pour défendre l'emploi en Bretagne, lors d'un "grand rassemblement festif" visant à transformer l'essai du 2 novembre à Quimper qui avait réuni plus de 15.000 personnes.
"Beaucoup de Bonnets rouges sont déjà là pour la préparation du terrain", assurait à la veille du rassemblement, réglé comme du papier a musique, Christian Troadec, maire DVG de Carhaix. M. Troadec est le leader du mouvement hétéroclite qui réunit petits patrons, commerçants, artisans, transporteurs, ouvriers, agriculteurs, pêcheurs ou simples citoyens, et qui a emprunté le symbole de la révolte antifiscale bretonne de 1675.
Le bonnet rouge a fait sa réapparition le 26 octobre dernier lors d'un rassemblement violent devant le portique écotaxe de Pont-de-Buis (Finistère), dispositif dont le mouvement réclame la suppression "pure et simple". Quelques jours plus tard, le gouvernement avait annoncé la suspension de cette taxe poids lourds en signe d’apaisement, mais sans parvenir à désamorcer la crise.
Le 2 novembre, les Bonnets rouges avaient mobilisé entre 15.000 et 30.000 personnes à Quimper pour la défense de l'emploi, la décentralisation et la suppression définitive de l'écotaxe, bien plus que les 6.500 à 13.000 personnes qui ont battu le pavé il y a une semaine en Bretagne à l'appel d'une intersyndicale qui espérait reprendre la main sur la thématique de l'emploi face à un mouvement qualifié de "poujadiste" et de "populiste".
Organisé sur le site du festival des Vieilles Charrues, dont Christian Troadec est le co-fondateur, une vaste prairie bordée d'arbres aux portes de la petite ville de 8.000 habitants, le rassemblement vise à transformer l'essai de Quimper.
"L'enjeu à Carhaix, c'est la mobilisation", reconnait Romain Pasquier, professeur à Sciences Po Rennes et auteur d'analyses de la situation bretonne. Il s'agira, selon lui, de "voir si ce mouvement garde toujours le soutien populaire qu'il avait eu a Quimper le 2 novembre". Un soutien incontournable "pour peut-être engager une nouvelle séquence de négociations avec l’État", explique-t-il a l'AFP.
"Revenir à la raison"
Et quoi de mieux pour mobiliser que des concerts et des animations ?
Parmi les artistes à l'affiche dès 12H30, Gilles Servat, chanteur et poète breton engagé de longue date en faveur de l'identité bretonne et auteur de "La Blanche Hermine", hymne officieux de la Bretagne qui avait galvanisé une partie de la foule à Quimper.
Les Frères Morvan, chanteurs incontournables des fêtes traditionnelles bretonnes --fest-noz--, seront également présents "en solidarité avec le monde du travail", selon le collectif "Vivre, décider et travailler au pays", à l'origine du mouvement des Bonnets rouges.
Bien d'autres artistes bretons seront de la partie, dont des dizaines de sonneurs qui ouvriront le défilé en direction du centre ville à partir de 16H00.
Mais auparavant plusieurs intervenants du collectif auront pris la parole depuis une scène installée face à la prairie, dont Christian Troadec, mais également Thierry Merret, autre porte-parole du collectif, représentant le monde agricole.
Le président de la FDSEA du Finistère demandera notamment à Jean-Marc Ayrault de "revenir à la raison". Il faut que le Premier ministre "écoute les acteurs de territoire que nous sommes, toutes corporations confondues, qu'on puisse le rencontrer et faire nos propositions et non pas que ce soit lui qui vienne au travers de son Pacte d'avenir nous dire ce qu'il faut faire".
Le Pacte d'avenir pour la Bretagne doit tenter de trouver des solutions pour sortir la région de la crise et a donné lieu à plusieurs réunions en novembre avec les acteurs économiques, politiques et sociaux de la région. Les Bonnets rouges se plaignent de ne pas avoir été consultés dans le cadre de l'élaboration de ce pacte.
La Bretagne a été frappée ces derniers mois par plusieurs plans sociaux et restructurations dans l'agroalimentaire (Doux, Gad, Tilly-Sabco, Marine-Harvest), mais également les télécoms et l'automobile. L'annonce de la mise en place de l'écotaxe en janvier 2014 a été la goutte qui a fait déborder le vase et conduit les Bretons à sortir dans la rue.