L'Europe, en plein marasme économique et frappée par un chômage record, a cherché à se mobiliser jeudi pour soutenir la croissance, en promettant de s'attaquer rapidement au chômage des jeunes et en abaissant son principal taux d'emprunt à un plus bas historique.
Dans la matinée, le président de la Commission José Manuel Barroso a plaidé pour un plan "ambitieux de lutte contre le chômage des jeunes" lors du sommet européen de juin, la situation d'"urgence sociale" ne permettant pas que l'on attende davantage.
Quelques heures plus tard, la Banque centrale européenne (BCE) a franchi une nouvelle étape dans sa politique d'assouplissement monétaire en annonçant la baisse de son principal taux directeur, baromètre du coût du crédit en zone euro, à 0,5%. La dernière baisse remontait à l'été, la BCE l'ayant porté en juillet à 0,75%.
Evoquant le pacte pour la croissance de 120 milliards d'euros décidé l'an dernier par les chefs d'Etat et de gouvernement des 27, M. Barroso a reconnu que sa "concrétisation reste en dessous de nos attentes".
Ce serait "excellent si l'on arrivait pour juin à renforcer cette dimension, notamment avec un plan plus ambitieux de lutte contre le chômage des jeunes", a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse après avoir reçu le nouveau chef du gouvernement italien, Enrico Letta.
Ce dernier a réaffirmé que la lutte contre le chômage des jeunes était la priorité de son gouvernement, soulignant que c'était le "cauchemar de son pays et de l'UE".
Dans un contexte de hausse quasi généralisée du chômage en Europe, avec plus de 19 millions de personnes sans emploi, le taux de chômage des jeunes atteint des records dans les pays les plus fragiles: plus de 59% en Grèce, près de 56% en Espagne, mais aussi 38,4% en Italie et 38,3% au Portugal.
Dans le cadre du budget pluriannuel pour la période 2014-2020, l'Union européenne a prévu une "Initiative pour les jeunes" dotée de 6 milliards d'euros pour les régions où le taux de chômage des jeunes est supérieur à 25%. Treize Etats membres sont concernés.
Mais M. Barroso a reconnu jeudi qu'à "elle seule, cette initiative ne pouvait pas résoudre le problème". "Nous avons besoin d'efforts plus tôt". Mais il n'a pas fourni de pistes concrètes, évoquant des possibilités via le budget européen rectificatif pour 2013, ainsi qu'un "partage" entre des "instruments" européens et des "efforts" au niveau de chaque pays concerné.
Mercredi, le président français François Hollande avait suggéré d'anticiper "peut-être dès la fin de l'année" le programme européen de lutte contre le chômage des jeunes.
Pour la secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), Bernadette Segol, il existe actuellement un "sens de l'urgence sociale en Europe". Les politiques d'austérité "ont échoué" et "quelque chose doit être fait si on veut que les citoyens restent associés au projet européen", a-t-elle déclaré à l'issue d'une rencontre entre la Commission européenne et les partenaires sociaux européens.
M. Letta, qui terminait jeudi une mini-tournée européenne qui l'a conduit à Berlin, puis à Paris et Bruxelles, a affirmé qu'il allait rentrer à Rome "plus optimiste". "Il y a prise de conscience de la lassitude sociale (...). Le sommet européen de juin doit donner des messages concrets dans la lutte contre le chômage des jeunes".
Reste à convaincre l'Allemagne, toujours hostile à l'augmentation des dépenses et dont la chancelière Angela Merkel a encore rappelé mardi à M. Letta sa détermination à lutter contre les déficits.
A Bruxelles, le nouveau chef du gouvernement italien a réaffirmé pour la énième fois sa volonté de respecter les engagements européens de son pays, notamment en matière de déficits publics.
Mais il a annoncé lundi une série de mesures de relance, notamment le non-paiement prévu en juin de la deuxième quote-part annuelle de la taxe foncière sur la résidence principale. Au total, ces mesures sont évaluées à quelque 10 milliards d'euros, ce qui l'obligera à prendre des mesures pour ne pas faire gonfler son déficit au delà des 3%.
M. Barroso s'est dit "très confiant" dans le fait que l'Italie puisse sortir dès cette année de la procédure de déficit excessif. Mais il a prévenu que cela dépendait des mesures "concrètes" que le nouveau gouvernement doit présenter à Bruxelles, qui annoncera sa décision fin mai. "Nous allons travailler afin d'obtenir un résultat positif", a promis M. Letta.
Dans un rapport publié jeudi, l'OCDE prévoit un déficit public à 3,3% du PIB cette année et 3,8% en 2014.
La Commission européenne doit publier ses propres prévisions économiques pour la zone euro et le reste de l'UE vendredi.