Après un dernier semestre 2011 très mauvais pour l'emploi salarié, l'économie française a recommencé timidement à créer des emplois au premier trimestre 2012 (+18.300 emplois, +0,1% sur le trimestre) mais à un niveau insuffisant pour permettre de stopper la hausse du chômage.
Les chiffres définitifs de l'Institut national de la statistique et des études économiques publiés mardi confirment la stabilisation des emplois salariés dans les secteurs marchands (hors agriculture) annoncée mi-mai dans un chiffrage provisoire (+10.200).
Avec 18.300 emplois de plus, l'Insee souligne néanmoins qu'il s'agit d'une "faible progression de l'emploi marchand".
Pour les deux trimestres précédents, l'Insee est moins pessimiste: 28.200 destructions au troisième trimestre 2011 et 8.100 pour le quatrième trimestre (au lieu de 31.500 et 22.600).
Sur un an, les créations d'emploi restent supérieures aux destructions enregistrées, avec un solde positif net de 31.000 postes (+0,2%), à 16,1 millions d'emplois au total. Des données publiées mardi parallèlement par l'Acoss, qui fédère le réseau des Urssaf collectant les cotisations sociales, indiquent une augmentation de 0,2% de l'emploi sur un an, avec 38.000 créations nettes, et une tendance "globalement stable" au premier trimestre (+0,0%).
Les 18.300 créations annoncées par l'Insee sur le trimestre sont insuffisantes pour laisser espérer une amélioration des chiffres du chômage.
En effet, compte tenu de la démographie et des réformes des retraites qui poussent les seniors à rester en emploi plus longtemps, environ 150.000 personnes arrivent chaque année sur le marché. "Il faudrait que l'économie crée 30 à 40.000 postes au moins chaque trimestre pour que le chômage commence à se stabiliser", rappelle Mathieu Plane, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Au premier trimestre, le taux de chômage calculé par l'Insee a grimpé de 0,3 point par rapport au trimestre précédent, à 9,6% de la population active en métropole (10% DOM compris, +0,2 points). La progression légère de l'emploi marchand sur le trimestre est tirée par la bonne résistance du tertiaire (hors intérim), qui compte pour les deux tiers des emplois en France, avec autant d'emplois créés qu'au trimestre précédent (+19.500).
Si la construction se redresse (+5.800) après trois trimestres dégradés, l'industrie continue à enregistrer des pertes (-6.200). La forte hémorragie dans l'intérim (-13.000 et -22.000 aux troisième et quatrième trimestres 2011) est stoppée, avec seulement 700 emplois détruits.
Au regard "des autres indicateurs macro-économiques très dégradés", les chiffres globaux sont "étonnants", "sans corrélation avec l'activité économique réelle", souligne M. Plane. Pour l'instant, les entreprises "encaissent": elles "ont eu davantage recours aux dispositifs de chômage partiel" au premier trimestre, observe-t-il.
Alors que l'Insee tablait sur 0,2% de croissance au deuxième trimestre, la Banque de France a abaissé ses prévisions début juin et table désormais sur un recul du produit intérieur brut (PIB) de 0,1% au printemps.
Les indicateurs "laissent penser que les chiffres de l'emploi salarié pour le deuxième trimestre ne seront pas bons" et il faut s'attendre à des "ajustements" douloureux dans les prochains mois, quand les entreprises répercuteront cette "perte de compétitivité", prédit M. Plane.
L'Insee reste très pessimiste. L'institut prévoit toujours 49.000 destructions d'emplois dans les secteurs marchands (hors agricoles) sur le semestre. Considéré comme un indicateur avancé du marché de l'emploi, le nombre d'intérimaires a rechuté de 2,1% en avril, selon des données publiées lundi par Pôle emploi, alors que leur nombre s'était redressé en février et mars.