La chancelière allemande Angela Merkel, de plus en plus perçue comme la voix de l'Europe, se rend mercredi à Bruxelles puis Londres pour évoquer le futur de l'euro et sortir de l'impasse les négociations sur le budget de l'UE avant un sommet crucial.
A Bruxelles, "à l'invitation du président du parlement européen", Mme Merkel prononcera "un discours-programme" dans lequel elle présentera "ses réflexions sur le futur de l'union économique et monétaire", selon son porte-parole, Steffen Seibert. Dans la soirée, elle rejoindra à Londres le Premier ministre britannique David Cameron pour un "dîner de travail".
Ce voyage en deux temps sera l'occasion pour la chancelière de rappeler son credo européen: pour sortir de la crise, l'UE doit aller vers plus d'intégration, notamment dans le domaine du contrôle budgétaire des Etats-membres.
Elle tentera surtout de dessiner un compromis pour résoudre le casse-tête du budget de l'Union européenne pour 2014-2020, au coeur de négociations houleuses.
L'étape londonienne sera cruciale tant l'attitude britannique suscite de crispations sur le continent.
"Le désenchantement de l'opinion publique au Royaume-Uni vis-à-vis de l'UE n'a jamais été aussi grand", a affirmé le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague, lors d'un forum de politique étrangère fin octobre à Berlin.
Exprimant le refus de Londres d'une intégration plus poussée en Europe, il a averti qu'on risquait de creuser un fossé au sein de l'UE en cherchant à européaniser des domaines comme la supervision bancaire et le contrôle des budgets nationaux, comme le souhaite l'Allemagne.
Ce désenchantement s'est traduit la semaine dernière par un vote en forme de camouflet pour David Cameron au Parlement britannique. Les eurosceptiques alliés à l'opposition travailliste ont jugé sa proposition de gel du budget européen trop timide et ont exigé une réduction.
Cela devrait encore compliquer les discussions sur le budget de l'Union, au centre du sommet extraordinaire des 22 et 23 novembre.
Angela Merkel, active sur tous les fronts européens depuis la rentrée, notamment celui de la crise grecque, a promis que l'Allemagne ferait "tout pour tenter d'aboutir à une solution".
"Nous sommes actuellement dans une phase de négociations intensives. C'est la raison pour laquelle Mme Merkel se rend à Londres", a expliqué vendredi son porte-parole.
Alors que Berlin apparaît de plus en plus comme la capitale de l'Europe, le voyage à Londres de la chancelière "peut être interprété comme +un wake up call+ (un appel à se réveiller) à destination des Britanniques" pour les avertir des risques d'un éloignement de l'UE, analyse Olaf Boehnke du Conseil européen des relations étrangères.
Selon lui, Merkel, parfois surnommée "Mutti" (maman) en Allemagne, va justement jouer en Grande-Bretagne le rôle d'une mère invitant ses enfants à ne "pas jouer avec le feu".
La Grande-Bretagne doit choisir, "soit elle voit son avenir à long terme dans l'Union européenne, soit ce n'est pas le cas", s'est agacé vendredi le commissaire européen au Budget, Janusz Lewandowski, dans une interview au quotidien Süddeutsche Zeitung.
Le président du groupe des Verts au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit, a même plaidé pour un référendum en Grande-Bretagne sur le maintien dans l'UE pour qu'ils décident enfin "s'ils deviennent le 51e Etat des Etats-Unis ou s'ils sont membres de l'Union européenne".
A Berlin, le ton reste plus conciliant. "La Grande-Bretagne est un membre de l'UE qui lui apporte quelque chose de précieux", a souligné vendredi M. Seibert, citant "sa conception du libre-échange, de l'entrepreneuriat et de l'économie". L'Allemagne tient à garder unie la famille européenne.