La perspective d'une finalisation dès la semaine prochaine de la reprise du constructeur automobile en déroute Opel par Magna s'éloigne, le Royaume-Uni et l'Espagne faisant barrage à une signature rapide.
Une réunion, convoquée à Berlin vendredi après-midi par le gouvernement allemand, instigateur du projet et désireux de le boucler au plus vite, a été boudée par les dirigeants européens.
Le ministre de l'Industrie espagnol Miguel Sebastian a certes fait le déplacement à Berlin, mais principalement pour rencontrer des dirigeants de Magna.
Discuter de financement avec ses confrères avant d'être convaincu par un projet "où tout le monde en Europe aura sa place" reviendrait à "parler de la note au restaurant sans avoir vu le menu ni déjeuné", a-t-il ironisé.
Une position proche de celle de son homologue britannique Peter Mandelson, qui avait également décliné l'invitation, et critiqué il y a quelques jours les "défauts" du projet de Magna, prévenant que Londres ne l'avaliserait pas en l'état.
En conséquence, il n'y a "pas de résultat à attendre de cette réunion", selon une source proche du gouvernement allemand interrogée par l'AFP.
Or Berlin espérait obtenir un accord européen sur le financement de 4,5 milliards d'euros d'aides publiques nécessaires à la finalisation de l'opération, prévue initialement la semaine prochaine.
Une échéance désormais "improbable parce que les pays veulent et doivent encore négocier avec Magna", a précisé la source allemande.
Mardi 13 octobre, c'est au ministère de l'Industrie espagnol, en présence des autorités régionales et des syndicats, que Magna devra s'expliquer sur ses intentions, notamment sur l'avenir de l'usine de Figueruelas (nord) et de ses 7.200 salariés, a déclaré M. Sebastian.
Ferdinand Dudenhöffer, professeur de l'université de Duisburg-Essen, dénonce un nouveau retard "dommageable" pour Opel, dont la survie dépend des deniers publics promis.
Le mois dernier, l'américain General Motors avait choisi Magna, allié à la banque russe Sberbank, pour reprendre 55% de ses activités européennes Opel/Vauxhall, suivant ainsi le choix du gouvernement allemand, très impliqué dans le dossier sur fond d'élections législatives.
Depuis, l'Allemagne est sous le feu des critiques de ses partenaires, qui l'accusent d'avoir joué la défense des emplois allemands aux dépens des autres.
Officiellement, Magna veut supprimer 10.500 emplois, sur environ 50.000 en Europe.
L'Allemagne, qui regroupe à elle seule la moitié de ces postes, serait touchée dans une proportion inférieure à la Belgique, où l'usine d'Anvers risque la fermeture, et à l'Espagne et le Royaume-Uni.
Les réactions de Londres et Madrid "sont compréhensibles", estime Stefan Bratzel, professeur à l'université de Bergisch-Gladbach interrogé par l'AFP, alors qu'au cours du long processus de désignation du repreneur d'Opel, les autres pays "n'ont pas été impliqués".
Mais pas question pour le spécialiste d'envisager que l'accord puisse échouer. La chancelière Angela Merkel, réélue fin septembre, ne peut pas se permettre de "perdre la face", même au prix "d'1 ou 2 milliards d'euros de plus" selon lui.
M. Sebastian aussi faisait preuve vendredi d'un relatif optimisme. "Nous sommes tout disposés à être convaincus par Magna" de la pérennité de son projet industriel, a assuré le ministre espagnol, qui attend de la réunion de mardi à Madrid "des progrès concrets, des chiffres concrets".