La démission surprise du ministre portugais des Finances a fragilisé le gouvernement de centre-droit et l'opposition de gauche, qui fustige sa politique d'austérité, a renouvelé ses appels à des législatives anticipées sur fond de mécontentement social en hausse.
Le chef du Parti socialiste, principal parti d'opposition, Antonio José Seguro a sollicité une rencontre "urgente" avec le président de la République Anibal Cavaco Silva pour lui demander, selon les médias portugais, de convoquer des élections anticipées. Il devait être reçu mercredi dans l'après-midi, a indiqué la présidence.
"Le PS défend la convocation d'élections pour que le pays prenne un nouveau cap", a ainsi déclaré après l'annonce lundi de la démission de Vitor Gaspar dont il dénonçait depuis plusieurs mois la politique de rigueur.
"Le gouvernement est mort, il ne reste plus qu'à définir la date des funérailles", a estimé de son côté le parti d'extrême-gauche, Bloc de Gauche, tandis que le Parti communiste a réclamé la démission de l'ensemble du gouvernement.
L'actuel gouvernement de centre-droit avait été porté au pouvoir en juin 2011 par des législatives anticipées, convoquées par le président Cavaco Silva après que les socialistes eurent reconnu l'échec de leur politique économique et demandé au Fonds monétaire international et l'Union européenne un plan de sauvetage sur trois ans de 78 milliards d'euros.
Depuis, le gouvernement du Premier ministre Pedro Passos Coelho dispose au Parlement d'une confortable majorité grâce au soutien de son partenaire, le petit parti conservateur CDS-PP dirigé par l'actuel ministre des Affaires Etrangères, Paulo Portas.
Changement du panorama politique
La démission de M. Gaspar, numéro 2 du gouvernement, a provoqué un changement du panorama politique, M. Portas devenant, après le Premier ministre, la principale figure du gouvernement.
M. Portas a plusieurs fois émis des doutes sur la validité de la politique d'austérité et a même averti qu'il pourrait rompre la coalition au pouvoir si un projet d'augmenter les impôts des retraités voyait le jour.
Mais le ministre des Affaires étrangères a été chargé par M. Passos Coelho de présenter, au plus tard le 15 juillet, une réforme de l'Etat afin d'économiser d'ici la fin de 2014, un total de 4,7 milliards d'euros pour redresser les finances publiques au moment où la dette du pays dépasse les 120 % du PIB.
Désormais maître d'oeuvre de ce projet, M. Portas risque, à terme, de concentrer sur lui les critiques de l'opposition et de se trouver dans une position aussi inconfortable que celle que M. Gaspar a connu.
Un risque d'autant plus réel que le Premier ministre semble résolu à poursuivre la politique de rigueur comme l'indique sa décision de remplacer M. Gaspar par son ancienne adjointe, Maria Luis Albuquerque, qui devrait suivre la même politique que son prédécesseur au moment où la Commission européenne a appelé le Portugal à "maintenir le rythme des réformes".
Avec la montée de la grogne sociale, marquée par des manifestations à répétition et quatre grève générales depuis l'arrivée de la droite au pouvoir, les derniers sondages ont donné au Parti socialiste un net avantage sur le Parti social démocrate de M. Passos Coelho, en cas de législatives anticipées, sans lui accorder toutefois la majorité absolue.
Alors que la constitution d'un "front de gauche" semble exclue tant les options défendues par le PS et les autres partis de gauche divergent, seule une alliance avec le Parti de M. Portas pourrait permettre aux socialistes de gouverner.
Une configuration difficile à envisager tandis que le président Cavaco Silva, qui appartient au même parti que le Premier ministre, devrait lui conserver son soutien et refuser de céder aux appels du Parti socialiste en faveur d'élections anticipées.