En pleine crise du secteur bancaire espagnol, la Commission européenne a présenté mercredi un plan de gestion des crises pour qu'à l'avenir les pouvoirs publics ne soient plus amenés à renflouer les banques, premier pas vers l'"union bancaire" qu'elle appelle de ses voeux.
"Nous ne voulons plus que les contribuables paient, les banques doivent payer pour les banques", a insisté le commissaire européen aux Services financiers, Michel Barnier en présentant une proposition législative en ce sens au cours d'une conférence de presse. Il s'agit de "casser le lien entre les crises bancaires et les finances publiques", a-t-il expliqué.
Au moment où l'Espagne vient de lancer un appel à l'aide à l'Europe pour recapitaliser ses banques après la demande d'aide publique historique de 23,5 milliards de Bankia, troisième banque du pays, "la difficulté est de faire en même temps deux choses nécessaires: prendre des mesures d'urgence (...) et préparer l'avenir", a reconnu M. Barnier.
Les propositions présentées mercredi s'inscrivent clairement dans le moyen terme, et découlent d'ailleurs d'une demande du G20 datant de 2009. Il s'agit d'éviter de nouvelles crises comme celle de Bankia, mais aussi celles qu'on a vues dans le passé avec les banques Fortis, Northern Rock, Lehman Brothers ou encore Dexia, a énuméré M. Barnier.
C'est aussi un premier pas vers l'"union bancaire" dont la Commission européenne souhaite l'avènement à plus ou moins long terme et qui reposerait sur une supervision plus européenne et un mécanisme commun de garantie des dépôts.
Le cadre prévoit trois étapes: au stade de la prévention, les banques et les autorités chargées de la résolution des crises bancaires auront notamment l'obligation de mettre en place des plans de résolution et de redressement.
Dans une deuxième phase, si une banque risque de ne plus respecter ses exigences de fonds propres, les autorités de surveillance pourront intervenir, par exemple en exigeant qu'elle mette en oeuvre les mesures prévues par son plan de redressement ou en nommant un administrateur spécial pour une durée limitée.
Enfin, dans un troisième temps, si la banque menace de faire défaut, quatre instruments pourront être utilisés.
Les autorités pourront vendre à une autre banque tout ou partie de la banque défaillante; un établissement relais pourra être créé pour regrouper les actifs sains avant qu'ils soient cédés à une autre entité; les actifs douteux pourront être placés dans une "bad bank"; et enfin un "bail-in" ou renflouement interne pourra être mis en oeuvre.
Par opposition au "bail-out" (sauvetage par des fonds publics), le "bail-in", qui n'entrera en vigueur qu'à partir de 2018, consistera à recapitaliser la banque en annulant ou diluant ses actions, en réduisant les créances détenues sur elles ou en les convertissant en actions. Ce sont donc les créanciers et actionnaires qui seront mis à contribution.
Pour fonctionner, ce système nécessitera la création de fonds de résolution financés par les banques, dont le montant devra atteindre 1% des dépôts couverts dans un délai de 10 ans. Les Etats pourront aussi fusionner ces fonds avec les systèmes de garantie de dépôts.
Dans le cas des banques européennes ou des groupes transnationaux, des "collèges d'autorité de résolution" seront constitués et supervisés par l'Autorité bancaire européenne (EBA) qui pourra trancher en dernier ressort en cas de litige.
M. Barnier a estimé qu'il faudrait "une année, si nous allons vite" pour que cette proposition législative soit approuvée par les Etats et le Parlement européen.
Le Royaume-Uni a accueilli favorablement cette initiative, qui "représente une avancée positive pour s'attaquer aux problème des banques +trop grosses pour faire faillite+", selon la porte-parole de Downing Street.
La Fédération allemande des banques (BDB) l'a aussi qualifié de "bonne chose" et de "seul moyen" de protéger la stabilité des marchés financiers des risques liés aux banques.
Quant à la la libérale britannique Sharon Bowles, qui préside la commission des Affaires économiques du Parlement européen, elle a regretté que "la proposition puisse être utile pour l'avenir mais ne résolve pas les problèmes actuels".