Dialogue de sourds jeudi à l'Elysée entre François Hollande et le foot français: le chef de l'Etat a maintenu sa taxe exceptionnelle de 75%, et les clubs pros ont maintenu en retour leur grève prévue fin novembre.
La fin de non-recevoir du président Hollande aux demandes d'aménagements du monde du foot pro concernant le projet de loi de la taxe à 75% sur les hauts revenus n'est pas une surprise.
Après la volte-face sur l'écotaxe et la taxation de l'épargne, le gouvernement avait multiplié les messages de fermeté sur ce nouveau dispositif fiscal avant la rencontre à l'Elysée entre les patrons du foot et le chef de l'Etat.
Après cette entrevue entre patrons du foot (délégation de neuf personnes) et M. Hollande, qui a duré environ une heure et demie jeudi après-midi, c'est un communiqué de l'Elysée qui a mis fin au faux suspense.
"La nécessité de redresser les comptes publics justifie, pleinement, cet effort demandé aux entreprises qui font le choix de verser des rémunérations annuelles d'un tel niveau", indique ainsi ce texte.
"Un plafonnement de cette contribution, à hauteur de 5% du chiffre d'affaires (qui privilégie les gros clubs comme le PSG, mais handicape les petits, selon les patrons du foot, ndlr), a déjà été prévu dans le projet de loi de finances pour prendre en compte la situation des entreprises de taille moyenne. Les clubs de football rentrent dans cette catégorie", poursuit l'Elysée.
La réaction des présidents de clubs de foot professionnels ne s'est pas fait attendre.
"Nous maintenons notre journée blanche"
"Nous maintenons nos positions, nous suspendons toujours notre participation à la commission Glavany (dite du foot durable, ndlr) et nous maintenons notre journée blanche (sans foot en Ligue 1 et Ligue 2) pour le dernier week-end de novembre", a déclaré Jean-Pierre Louvel, président du syndicat des clubs pros (UCPF).
Les différentes composantes du foot pro avaient annoncé le 23 octobre qu’elles suspendaient leur participation à cette commission mise en place par le ministère des Sports et présidée par Jean Glavany (député PS), pour protester contre le projet de taxation à 75% jugé "injuste et discriminatoire".
Le 24 octobre, les clubs pros avaient voté la grève, cette fameuse "journée blanche", sans matches de L1 et L2, du vendredi 29 novembre au lundi 2 décembre inclus.
"Le président de la République nous a écoutés attentivement mais ne nous a absolument pas entendus, a déploré Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP), qui participait à la rencontre à l'Elysée. Aucune solution n'a été trouvée ce (jeudi) soir, donc la mobilisation continue, nous avons un mois pour convaincre".
Le football français, qui n'a plus connu de grève depuis 1972 - les joueurs voulaient alors faire reconnaître leurs droits contractuellement -, en arrivera-t-il alors à cette extrémité?
La réaction du public en cas de grève du foot risque d'être très virulente, trois ans après la fameuse grève honnie des Bleus à Knysna, lors du Mondial 2010.
"Si on fait grève il faut aller se cacher"
"Je pense que si notre corporation fait grève, il faut vraiment aller se cacher, vraiment il faut se cacher", a d'ailleurs déclaré ce jeudi sur RTL l'entraîneur d'Evian (L1) Pascal Dupraz.
L'image renvoyée par les salaires pharaoniques de certains joueurs ne plaide pas en faveur des clubs. "On ne pleure pas sur leur sort, (...) ils paient trop cher leurs joueurs", avait ainsi indiqué Chantal Jouanno, sénatrice UDI et ancienne ministre des Sports, dès jeudi matin sur France Info.
Les clubs de foot pro ne se faisaient guère d'illusions sur un retrait du projet de loi sur la taxe à 75%, mais voulaient négocier une non-rétroactivité, c'est-à-dire ne payer le nouvel impôt que sur les futurs contrats de joueurs.
Selon un argumentaire du foot pro que s'est procuré l'AFP, cette taxe à 75% représenterait une charge totale de 44 millions d’euros pour la L1, estimation basée sur les hauts revenus d'environ 120 joueurs des 14 clubs concernés.
Et les patrons du foot français de mettre aussi en avant la perte cumulée de 108 millions d'euros en 2011/12 pour les deux divisions (L1 et L2).
Jusqu'ici tous les clubs professionnels, sauf un, celui de Guingamp, club longtemps présidé par M. Le Graët, actuel président de la fédération de football (FFF) et qui fut également maire PS de la ville, ont affiché leur détermination dans le projet de "journée blanche" pour la fin novembre.