Devant le marasme économique persistant en zone euro, accompagné d'un niveau de chômage record, la Banque centrale européenne (BCE) est sous pression pour baisser son principal taux directeur jeudi même si cette mesure pourrait n'avoir que peu d'effet.
"La détérioration récente des indicateurs de confiance a clairement augmenté la probabilité d'une action supplémentaire de la BCE cette semaine", écrit Carsten Brzeski, économiste chez ING, constatant que la majorité des investisseurs considèrent ce scénario comme acquis.
La reprise attendue à partir du printemps perd en crédibilité à mesure de publications décevantes. En particulier, l'activité privée s'est encore contractée en avril, n'épargnant plus l'Allemagne, première économie de la région.
"La longue période de faiblesse économique s'étend désormais aux pays les plus solides de l'Union monétaire, avec pour risque que le moteur de sa croissance ne s'essouffle", note Annalisa Piazza, de Newedge.
Le chômage a lui atteint un nouveau record en mars, touchant 12,1% de la population active totale de la zone euro, mais 26,7% en Espagne, 27,2% en Grèce ou 17,5% au Portugal.
Des chiffres qui ont relancé le débat sur le bien-fondé des politiques d'austérité menées depuis le début de la crise de la dette, destinées à redresser les finances publiques, et les appels à la BCE pour qu'elle intervienne une nouvelle fois lors de la réunion de son conseil des gouverneurs qui a lieu comme deux fois par an hors ses murs francfortois, à Bratislava.
Le taux directeur, baromètre du crédit en zone euro, est fixé depuis juillet à 0,75%, son plus bas niveau historique, et de l'avis des analystes la BCE pourrait le porter à 0,5%.
Pour Jennifer McKeown, de Capital Economics, si elle ne le faisait pas, la menace d'une déception plane, avec pour corollaire une confiance des investisseurs en berne.
Un nouveau relâchement des taux n'aurait cependant que peu ou pas d'effet sur la situation économique, tant que la BCE n'aura pas résolution son problème de transmission de sa politique monétaire, jugent nombre de ses confrères. Car l'institution a beau inonder les banques de liquidités bon marché, ces dernières peinent à prêter aux ménages et aux entreprises, en particulier les petites et moyennes, dans les pays les plus en difficulté, ou alors à des taux rédhibitoires.
"Une baisse de taux non accompagnée de mesures exceptionnelles pour réparer le mécanisme de transmission ne fait pas sens", estime ainsi Carsten Brzeski.
Début avril, le président de la BCE Mario Draghi avait souligné que son institution réfléchissait à la manière adéquate de surmonter ce souci, sans développer davantage. Jeudi, il pourrait donner des pistes sur la nature des mesures envisagées à défaut d'annonces concrètes.
Selon les analystes, la BCE a le choix entre élargir la gamme des garanties qu'elle accepte des banques en échange de ses prêts pour les encourager à prêter aux entreprise, participer à un plan d'aide en faveur des PME avec la Banque européenne d'investissement aux commandes ou racheter directement des actifs émis par les entreprises. Autant de mesures qui risquent toutefois de susciter l'opposition de la Bundesbank, selon qui la BCE ne serait pas dans son rôle.