par William James et Elizabeth Piper
LONDRES (Reuters) - Les députés britanniques ont exprimé leur colère à l'adresse du Premier ministre Boris Johnson et du président américain, Joe Biden, mercredi lors d'un débat à la Chambre des Communes à Londres sur la chute de l'Afghanistan aux mains des taliban.
S'exprimant lors de cette séance exceptionnelle convoquée dans l'urgence, Boris Johnson a été interrompu une minute à peine après le début de son allocution par un élu de sa majorité, signe des tensions suscitées par la crise au sein même du Parti conservateur.
"Nous jugerons ce régime sur la base des choix qu'il fera et sur ses actes plutôt que sur ses paroles, sur son attitude face au terrorisme, au crime et à la drogue, ainsi que sur l'accès humanitaire et les droits des filles à recevoir une éducation", a dit le chef du gouvernement, qui a interrompu ses vacances après la chute de Kaboul dimanche.
Le chef de file de l'opposition travailliste, Keir Starmer, lui a reproché sa gestion "inconséquente", évoquant "une mauvaise évaluation majeure de la capacité de résistance des forces afghanes et une complaisance effarante de notre gouvernement à l'égard des taliban".
L'ex-Première ministre conservatrice Theresa May s'est elle aussi interrogée sur les raisons pour lesquelles la Grande-Bretagne avait aussi mal évalué la capacité des taliban à prendre rapidement le pouvoir.
"Avons nous si mal appréhendé le gouvernement afghan ? Notre connaissance de la situation sur le terrain était-elle si erronée ?", a-t-elle demandé à son successeur. "Ou avons nous simplement eu le sentiment que nous devions suivre les Etats-Unis en espérant que, par miracle, tout serait réglé en une nuit ?"
Plusieurs députés ont critiqué la décision des Etats-Unis de se retirer les troupes d'Afghanistan avant la fin du mois, après laquelle, a reconnu Boris Johnson, le Royaume-Uni n'avait pas d'autre choix que de retirer ses propres forces, et les reproches de l'administration Biden visant les forces afghanes après leur défaite.
Tom Tugendhat, élu conservateur et président de la commission des Affaires étrangères qui a lui-même servi en Afghanistan, s'est dit à la fois triste et en colère.
"J'ai vu des hommes de valeur portés en terre, emportant avec eux une part de moi, une part de nous tous", a-t-il dit.
"Voir (Joe Biden) mettre en doute le courage d'hommes avec lesquels j'ai combattu et affirmer qu'ils ont fui est honteux. Ceux qui n'ont jamais combattu pour les couleurs qu'ils brandissent devraient être prudents lorsqu'ils critiquent ceux qui l'ont fait."
Le gouvernement britannique a annoncé qu'il était prêt à accueillir jusqu'à 5.000 Afghans en un an et jusqu'à 20.000 au total, en donnant la priorité aux femmes, aux filles et aux minorités.
(Reportage William James, rédigé par Elizabeth Piper, version française Marc Angrand, édité par Laetitia Volga)