STRASBOURG (Reuters) - La Cour européenne des droits de l'Homme a jugé jeudi irrecevable une requête de la banque suisse UBS AG qui contestait la caution de 1,1 milliard d'euros imposée par la justice française dans l'enquête sur le démarchage illicite présumé de clients français.
La banque suisse jugeait cette caution contraire aux principes de la présomption d'innocence et de la protection de la propriété.
La juridiction du Conseil de l'Europe rappelle que le cautionnement vise "à garantir la représentation de la personne mise en examen à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement, ainsi que le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction".
Elle estime que le montant demandé à la banque suisse par les juges d'instruction parisiens qui instruisent le dossier et confirmé par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris respecte le principe de proportionnalité.
Il a été fixé "de manière particulièrement motivée, en fonction des résultats des investigations, des faits reprochés, de l'ampleur des infractions poursuivies et du préjudice possible, ainsi que de l'amende encourue en cas de condamnation, mais aussi expressément à la lumière des ressources de la banque requérante", dit la cour de Strasbourg.
Dans cette affaire, le Parquet national financier (PNF) a requis le renvoi en correctionnelle de la banque suisse UBS pour démarchage illicite et blanchiment aggravé de fraude fiscale, et de sa filiale française pour complicité de ces délits. Il a aussi requis le renvoi de six anciens cadres de la banque : trois de chez UBS France, et trois de chez UBS AG.
Les magistrats du PNF et la banque sont en train de négocier une "convention judiciaire d'intérêt public", nouvelle procédure créée par la loi Sapin 2 qui permettrait une transaction financière, a indiqué à Reuters une source proche du dossier, confirmant une information des Echos.
Si cette procédure aboutissait, il s'agirait d'une première en France. Les décrets de la loi Sapin 2 n'ont pas encore été publiés et les négociations ne pourront pas être clos tant que ce n'est pas le cas, souligne toutefois une autre source.
Les juges soupçonnent UBS AG 'avoir mis en place un système de blanchiment permettant à des résidents français de dissimuler leurs avoirs au fisc. Le blanchiment présumé aurait eu lieu de 2004 à 2012, une pratique aggravée par son "caractère habituel", selon les enquêteurs.
La banque suisse a dû verser une caution de 1,1 milliard d'euros dans cette affaire.
En cas de procès, elle encourt une amende de 3,75 millions d'euros pour démarchage illicite et de la moitié de la valeur des fonds sur lesquels ont porté les opérations présumées frauduleuses pour blanchiment.
Les juges français ont évalué à un montant record de 4,88 milliards d'euros l'amende qui pourrait être infligée à la banque suisse si elle est reconnue coupable, selon une source proche du dossier.
(Gilbert Reilhac, avec Chine Labbé, édité par Yves Clarisse)