par Gregory Blachier
PARIS (Reuters) - Le projet de budget pour 2016, le dernier de plein exercice du quinquennat de François Hollande, sera présenté mercredi dans un contexte de reprise lente qui maintient la France sous pression, avec un parti pris confirmé : moins d'impôts et de charges.
Le "cadrage macro-économique" dévoilé la semaine dernière s'est inscrit dans la ligne du programme de stabilité soumis au printemps à la Commission européenne, avec l'objectif de ramener le déficit public à 3,3% en 2016 après 3,8% espérés cette année.
Selon Les Echos de mardi, le seul déficit budgétaire devrait être de 72 milliards l'an prochain, à peine moins que les 74 milliards attendus en 2015.
Hors effet de l'inflation et compte tenu des prévisions de croissance pour 2015 et 2016, ce montant, s'il est confirmé, représenterait déjà 3,3% du PIB, ce qui signifie que les efforts seront faits ailleurs : collectivités et Sécurité sociale, pour laquelle l'objectif de déficit est à 9,7 milliards.
La dette, elle, doit quasiment se stabiliser, "nettement en dessous de 100% du PIB" avant de commencer à diminuer en 2017, et sa charge pourrait être moindre que les 47,34 milliards prévus dans la loi de programmation des finances publiques, grâce aux taux d'intérêt et à l'inflation faibles.
Pour tenir ces objectifs, le gouvernement devra toutefois présenter de nouvelles pistes d'économies puisque l'été s'est montré gourmand en termes de fonds publics, avec la crise des réfugiés ou les aides promises au monde agricole.
Les effectifs de la fonction publique d'Etat devraient en outre repartir à la hausse, avec la création nette attendue de 8.300 postes l'an prochain du fait du renforcement des missions de sécurité intérieure de l'armée à la suite des attentats de janvier.
DERNIER BUDGET "NORMAL" DU QUINQUENNAT
Sur le plan politique, la réforme de la dotation globale de fonctionnement des collectivités, appelées à contribuer pour 11 milliards d'euros aux 50 milliards d'euros d'économies prévues d'ici 2017, s'annonce délicate face aux élus locaux, très remontés.
Si la France a répondu en 2015 aux demandes de Bruxelles, elle reste sous surveillance, en témoigne la récente dégradation d'un cran de sa note souveraine par l'agence Moody's, en raison de perspectives de croissance faibles à moyen terme.
Le ministre des Finances, Michel Sapin, a estimé récemment que la croissance nulle au second trimestre après +0,7% sur les trois premiers mois de l'année ne remettait pas en cause les prévisions du gouvernement (1,0% pour 2015 puis 1,5% en 2016).
A l'aube de présenter un dernier budget "normal", puisque le prochain portera sur une année électorale, le gouvernement doit donc réaliser ses derniers arbitrages et envoyer d'ultimes signaux forts sans s'aliéner encore une partie de la majorité, comme ce fut le cas avec les "frondeurs" des exercices passés.
Il accordera comme prévu neuf milliards d'euros de baisses de charges et de fiscalité aux entreprises, avec toutefois un décalage de trois mois, au 1er avril, pour neutraliser le coût des mesures de "suramortissement" et pour l'apprentissage, qui a été dénoncé par le patronat.
DÉFENSE ET AGRICULTURE PRÉSERVÉES
Deux milliards d'euros de baisses d'impôts supplémentaires bénéficieront à quelque trois millions de ménages, après les trois milliards accordés en 2015, ce que finance en partie le recouvrement des impôts dus par les détenteurs d'avoirs non déclarés à l'étranger. En 2016, il est prévu à 2,4 milliards.
Les ministères, eux, ne seront pas tous logés à la même enseigne, du fait d'une stabilisation prévue des crédits à hauteur de 203 milliards. Des moyens supplémentaires devraient être dégagés pour l'agriculture après l'annonce en septembre d'un plan de soutien à l'investissement de trois milliards sur trois ans, après un premier plan d'aide de 600 millions.
La Défense, mise à contribution sur le plan intérieur dans le cadre de Vigipirate et sur le plan extérieur avec les survols et les premières frappes en Syrie, est préservée : 3,8 milliards d'euros de crédits sur 2016-2019 ont été votés cet été.
L'apprentissage ou l'enseignement supérieur (100 millions d'euros pour compenser l'augmentation du nombre d'étudiants) verront aussi leurs crédits augmenter.
Des économies ou recettes sont donc à trouver et des mesures comme l'élargissement au gaz et aux carburants de l'assiette de la taxe sur l'électricité pourraient y participer.
Dans le logement aussi, où François Hollande a voulu rassurer les acteurs du logement social sur le volume des aides à la pierre mais où est attendue une réforme du régime des APL, des aides qui coûtent près de 18 milliards d'euros par an.
(avec Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)