Le parcours à rallonge du projet de loi Macron à l'Assemblée nationale parviendra mardi à son terme en première lecture, avec un vote attendu sans grande appréhension par le gouvernement mais avant lequel Manuel Valls a rappelé à l'ordre les socialistes contestataires.
Après plus de 190 heures de discussions en commission et en séance, achevées dimanche à 06H00 du matin, ce texte de quelque 200 articles "pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques", emblématique de la ligne réformatrice affichée par l'exécutif, doit passer le cap du vote solennel vers 17 heures.
Dirigeants socialistes et gouvernement se montrent confiants sur son adoption, car les probables voix manquantes dans la majorité devraient être compensées par l'abstention d'une majorité d'UDI et l'abstention ou le vote "pour" d'une poignée d'UMP (Hervé Mariton, Frédéric Lefebvre...).
Le Premier ministre, qui a défendu un texte "positif pour les salariés" et "important pour notre économie", n'en a pas moins appelé lundi à "la responsabilité" les députés PS tentés de s'abstenir, voire de voter contre, tel l'ancien ministre Benoît Hamon. Il a affirmé que "l'exigence des Français" était d'en finir avec les "petites querelles" et autres "préparations de congrès" vu "les événements que nous connaissons", allusion aux attentats de Paris et à leurs suites.
Et Manuel Valls viendra encore plaider mardi matin devant le groupe PS. Attention au "raidissement", ont mis en garde des socialistes critiques, tel Christian Paul.
La grande majorité des socialistes et des radicaux de gauche s'apprêtent à approuver le texte du ministre de l'Economie Emmanuel Macron. Les écologistes sont partagés, entre les tenants d'une ligne très critique comme l'ex-ministre Cécile Duflot et les modérés.
La plupart des UMP et le Front de gauche voteront contre le projet de loi, les premiers le jugeant fourre-tout (de la libéralisation du transport aux privatisations des aéroports de province) et pas à la hauteur des nécessités de la France, les seconds dénonçant "des régressions sans nuance pour les droits des salariés".
Le texte sera ensuite examiné au Sénat à compter d'avril, l'Assemblée ayant le dernier mot.
- La bataille du dimanche -
Si la droite, UMP en tête, a concentré l'essentiel de ses attaques sur la réforme des professions règlementées du droit, dont les notaires, la gauche s'est divisée principalement autour de l'extension du travail dominical, décriée comme une "régression" sociale par Martine Aubry, des nouvelles règles de licenciements collectifs ou de la réforme des prud'hommes.
La création, par décret, de "zones touristiques internationales" où les commerces pourront être ouverts en soirée jusque minuit et tous les dimanche, a aussi suscité l'ire de la maire de Paris Anne Hidalgo.
Présent de bout en bout au banc du gouvernement, malgré les regrets de certains députés de ne pas y voir notamment la ministre de la Justice Christiane Taubira, Emmanuel Macron, pour son baptême du feu dans l'hémicycle, a pris soin de répondre longuement aux amendements ou interpellations.
Si ses défenseurs, surtout socialistes mais de droite aussi, n'ont cessé de vanter son "écoute", sa "pédagogie" et sa "coproduction" avec les députés, "paradoxale pour un ministre n'ayant jamais été parlementaire", ses détracteurs l'ont critiqué pour vouloir "obtenir à tout prix son certificat de bon réformateur" (l'UMP Christian Jacob) ou pour n'être "que le petit porteur d'eau de la Commission européenne" (le Front de gauche André Chassaigne).
Au frondeur Laurent Baumel qui lui conseillait samedi de "réfléchir sérieusement" à "faire un geste politique" avant le vote, M. Macron a riposté qu'il "ne cherchait pas des compromis politiques pour rallier des voix".
Sans bouleverser les volets phares du texte, le gouvernement a accepté des modifications souvent souhaitées par le rapporteur général Richard Ferrand (PS) ou les rapporteurs thématiques, comme sur le mécanisme d'encadrement des tarifs des notaires, la réforme du permis de conduire ou la liberté laissée aux élus d'autoriser l'ouverture des commerces jusque 12 dimanches par an. Face à la dénonciation par les médias d'"une censure", le secret des affaires a aussi été supprimé du projet de loi.
Ironisant sur le texte suivant, la réforme des compétences des collectivités territoriales (dite loi NOTRe) dont l'examen démarre mardi soir, le président PS de la commission des Lois Jean-Jacques Urvoas a tweeté: "Vous aimez la ? Vous allez adorer la loi NOTRe: + de 2.000 amendements déposés".