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Du "Greferendum" au "Grexit", récit d'une négociation catastrophe

Publié le 28/06/2015 09:57
Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis à Bruxelles, le 27 juin 2015 (Photo John Thys. AFP)

Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis à Bruxelles, le 27 juin 2015 (Photo John Thys. AFP)

La réunion de la dernière chance entre la Grèce et ses créanciers a viré au scénario catastrophe après cinq mois de bras de fer, avec une rupture des négociations, précipitant le pays vers un défaut de paiement et une sortie de la zone euro. Récit.

"Attendez, on a un appel..". Il est minuit passé dans la nuit de vendredi à samedi au 13e étage de la Commission européenne, quand les négociateurs grecs quittent la table. Ils viennent d'apprendre que le Premier ministre Alexis Tsipras a convoqué, sans préavis, un référendum sur l'offre à prendre ou à laisser faite par ses partenaires.

Quelques heures plus tôt, la Grèce s'affirmait prête à continuer à négocier pour faire fléchir ses créanciers. En quelques heures, elle a décidé de franchir la ligne rouge.

A Bruxelles, la stupeur prévaut: le scénario du référendum tombe au pire moment, dans la dernière ligne droite des négociations alors qu'on y était à "98%-99%", rapporte un participant. "Tsipras a tiré ce coup-là trop tôt", estime-t-il a posteriori.

L'atmosphère est de plomb samedi à l'arrivée à Bruxelles des ministres de la zone euro, pour une cinquième réunion en dix jours, censée sceller un accord après deux sommets de chefs d'Etat dans l'intervalle. Beaucoup des ministres "en ont marre".

"ce n'est pas la première fois que le gouvernement grec crée du drame encore et encore", persifle le ministre slovaque des Finances, Peter Kazimir.

La fatigue s'ajoute à la frustration de ne pas avancer et de n'avoir pas eu pendant longtemps de document de négociations sur lequel se pencher. "Ils apprenaient l'état des négociations via des fuites" dans la presse, relate un responsable européen.

"Déception", "surprise négative", "rupture unilatérale des négociations", les Grecs en prennent pour leur grade.

Le trublion Yanis Varoufakis, le ministre grec des Finances, arrive tout de noir vêtu. Dans la salle de réunion, ses confrères le snobent, jusqu'à une tape sur l'épaule du Finlandais, Alex Stubb, pourtant du camp des durs. Varoufakis "vit dans une réalité parallèle", estime un diplomate.

- Une certaine "empathie" -

Début des discussions. Assez rapidement, les 18 refusent d'accéder à la demande d'Athènes de prolonger d'un mois le programme d'assistance financière, histoire d'aller au-delà du référendum prévu le 5 juillet. Encore une façon de gagner du temps, se plaint-on dans la salle. Le Français Michel Sapin montre une certaine "empathie", selon certains participants.

Son collègue Varoufakis lui en saura gré et saluera plus tard "son ami" au sein de l'Eurogroupe. Le Grec ira jusqu'à consulter le service légal européen pour vérifier si ses 18 collègues peuvent prendre une décision sans son accord.

Pendant ce temps la salle de presse, remplie à ras bord, s'agite. Des rumeurs circulent sur la fin de la réunion et sur une conférence de presse imminente de M. Varoufakis. C'est finalement le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, le patron de la zone euro, qui va prendre la parole.

La voix blanche, il annonce d'un ton solennel que le plan d'assistance financière dont bénéficie Athènes depuis 2012 "va prendre fin le 30 juin", trois jours plus tard. La rupture est consommée et la zone euro fait un "saut dans l'inconnu", selon les termes de l'Irlandais Michael Noonan.

C'est une "triste journée pour l'Europe", lance M. Varoufakis, en quittant Bruxelles précipitamment alors que ses collègues continuent leur réunion. "Il avait dit tout ce qu'il avait à dire", résume Michel Sapin.

La zone euro amputée de l'un de ses membres, une configuration totalement inédite, entame des discussions sur le "plan B", le scénario catastrophe pour lequel tout le monde utilise désormais un euphémisme: "les conséquences".

Sur la table, discussion sur le contrôle des capitaux et sur la situation des banques. Beaucoup veulent croire qu'un défaut de la Grèce, suivi d'une sortie de l'euro n'aura pas de retombées sur leur pays. "Ne croyez pas que le +Grexit+, c'est juste la Grèce", avertit un responsable.

On a vécu "un moment historique dans le mauvais sens du terme", conclut une source proche des négociations.

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