PARIS (Reuters) - Le numéro un des Républicains, Bernard Accoyer, a appelé mardi son parti à ne pas tomber dans le "piège" qui consisterait à exclure en bloc les "constructifs", dont certains dirigeants de droite réclament l'éviction pour avoir pactisé avec l'exécutif.
Les Républicains qui ont rejoint le gouvernement ainsi que Thierry Solère et Franck Riester, à la manoeuvre à l'Assemblée nationale, font l'objet d'une procédure disciplinaire qui pourrait aboutir à un bannissement si le bureau politique en décide ainsi en fin de journée.
Mais, selon Bernard Accoyer, le risque d'une telle mesure est de donner une image de brutalité et de précipiter la dislocation de la droite.
"Nous n'allons pas tomber dans le double piège. Le double piège qui serait celui de donner l'image du coupeur de tête sans réfléchir ou bien dans celui qui est tendu par Emmanuel Macron depuis le début qui (...) voudrait faire exploser complètement la droite", a déclaré le secrétaire général de LR sur France 2.
"Je n'exclus pas l'exclusion", a toutefois ajouté l'ex-président de l'Assemblée nationale, qui assure l'intérim à la tête du parti en attendant l'élection d'un nouveau président, probablement au mois de décembre.
Il n'est pas le seul à craindre les effets d'une exclusion des mis en cause, qui ont chacun reçu la semaine dernière une convocation devant les hautes instances du parti.
"Ils veulent avoir ce statut de victime. Je leur refuse ce statut de victime", a par exemple jugé Bruno Retailleau, fidèle parmi les fidèles de François Fillon durant la campagne présidentielle, sur CNEWS. "On ne peut pas mettre dehors des gens qui sont déjà à l'extérieur."
D'où le besoin, selon Eric Woerth, de trouver une solution qui permette d'acter le divorce sans prononcer le mot "exclusion".
"Je crois que c'est un terme qu'il ne faut pas employer parce que c'est un terme violent, l'idée n'est pas d'être brutal", a déclaré le député sur BFM TV.
"Il faut prendre acte du fait qu'ils se sont éloignés de notre parti et que donc ils sont ou suspendus, ou en tout cas ils ne peuvent pas être membres opérationnels, actifs du parti. Il faut trouver une formule", a-t-il poursuivi.
"NOUS DÉPOSERONS UN RECOURS"
Au sein de LR, certains, comme Eric Ciotti, ont plaidé ouvertement pour l'exclusion pure et simple, en reprochant aux "constructifs" d'avoir entretenu la confusion et par conséquent d'avoir contribué à la défaite de plusieurs dizaines de candidats aux législatives du mois de juin.
Mais d'autres, à l'image du président du Sénat Gérard Larcher, s'opposent à une telle mesure, au nom de la pluralité nécessaire à droite.
En réalité, le bureau politique devra statuer sur des cas différents : le Premier ministre, Edouard Philippe, est de facto devenu chef de file de la majorité macronienne tandis que Thierry Solère tient à sa place au sein de son parti et envisage même de postuler à la présidence lors du prochain congrès.
"Si nous sommes exclus des Républicains, nous déposerons un recours", a-t-il prévenu mardi sur LCI.
Gérald Darmanin ne croit pas non plus à une éviction, qui ne se fonderait, selon lui, sur aucun motif valable alors même qu'il porte, au ministère des Comptes publics, des propositions défendues par la droite comme le rétablissement du jour de carence pour les fonctionnaires ou des baisses d'impôts.
"Ce serait idiot qu'aujourd'hui, Les Républicains, plutôt que de se poser la question pourquoi ils ont perdu, pourquoi ils ont fait le Trocadéro (un meeting pro-Fillon durant la campagne présidentielle-NDLR), ils préféreraient exclure ceux qui ont eu raison avant tout le monde", a-t-il jugé sur RTL.
Au-delà du sort personnel des "constructifs", c'est l'avenir de la droite qui est en train de se jouer.
Secoués par les revers de la présidentielle et des législatives, Les Républicains se cherchent une ligne, entre son aile la plus à droite incarnée par Laurent Wauquiez, probable candidat à la présidence, et sa frange centriste et européenne, prête à travailler avec l'exécutif.
"On n'a peut-être plus grand'chose à faire ensemble", a estimé fin juin Xavier Bertrand, qui a renoncé le mois dernier à affronter Laurent Wauquiez.
(Simon Carraud, édité par Sophie Louet)