PARIS (Reuters) - Marine Le Pen somme publiquement Florian Philippot, qui cumule ses fonctions de vice-président du Front national et de président de sa propre association, de clarifier sa situation et de se concentrer sur la "refondation" du parti d'extrême droite.
Dans une interview publiée vendredi dans Le Parisien, l'ex-candidate à la présidentielle déclare qu'il n'y a "pas de distance" entre elle et son numéro deux, lequel a exaspéré certains cadres frontistes ces derniers mois en multipliant les initiatives, comme la fondation des Patriotes au mois de mai.
Cependant, priée de dire si Florian Philippot devait "clarifier" sa situation, Marine Le Pen a répondu "oui".
"Qu'il y ait des think-tanks, ça ne me pose aucun souci. Mais nous sommes tout de même au coeur de la refondation du mouvement. Je souhaite donc que tous les dirigeants du FN se reconcentrent sur cette refondation et qu'ils apportent leurs réflexions à l'intérieur du mouvement", ajoute-t-elle.
Le conseiller de la présidente assure que son association n'est qu'un "laboratoire d'idées" destiné à alimenter la réflexion du FN. Mais une partie de l'état-major y voit le signe de velléités d'émancipation.
De hauts dirigeants, comme le secrétaire général Nicolas Bay, se sont émus dans la presse du calendrier choisi par Florian Philippot, qui a crée Les Patriotes dans la foulée de la défaite à la présidentielle, sans attendre la fin de la campagne des législatives.
La personnalité de l'énarque et le courant qu'il incarne - un souverainisme étatiste, "ni de droite, ni de gauche" et farouchement anti-européen - font en réalité débat depuis longtemps parmi les dirigeants du FN.
DÉBAT POTENTIELLEMENT "VIF"
Ses opposants internes lui prêtent une influence nocive sur Marine Le Pen et souhaiteraient remiser certaines de ses propositions, qu'ils jugent contre-productives sur le plan électoral, pour privilégier une "union des droites" sur la base d'un discours conservateur et anti-immigration.
"Il faut qu'elle vire un certain nombre de types autour d'elle, (...) Philippot, la famille Philippot, un certain nombre de ses conseillers, qui sont des gens néfastes", a par exemple déclaré, le 8 septembre, Robert Ménard, maire de Béziers et allié au FN.
De fait, le vice-président a assisté, impuissant, à la mise à l'écart de l'une de ses fidèles, Sophie Montel, à qui la direction a retiré la présidence de son groupe au conseil régional de Bourgogne-France-Comté, officiellement en raison de litiges locaux.
Dans son interview au Parisien, la présidente reconnaît que le débat pourra être "vif" dans les mois à venir.
Mais, parallèlement, elle dit n'avoir aucune intention de dévier de sa ligne, qu'elle présente comme la synthèse entre le frontisme historique et la tendance Philippot.
"Il y a beaucoup de gens qui essaient de me tirer d'un côté de la manche ou de l'autre. Mais ils ont oublié que je suis d'une grande solidité", déclare-t-elle.
"Je présenterai aux adhérents une ligne qui est celle que je défends depuis bien longtemps : équilibrée entre ces fameux fondamentaux et en même temps cette aspiration à protéger nos patriotes. Je ne change rien de ce que je pense."
Engagée après le second tour de la présidentielle, la "refondation" du parti, appelé à changer de nom et peut-être de siège, doit s'achever par un congrès prévu en mars prochain.
(Simon Carraud, édité par Sophie Louet)