Le Crédit Agricole a profité de l'année 2012 qui s'annonçait déjà noire pour faire un grand ménage dans ses comptes, au prix d'une perte nette record de 6,47 milliards d'euros pour son entité cotée, en espérant solder un héritage devenu trop lourd à porter.
C'est le deuxième exercice déficitaire pour l'entité cotée de la banque verte, qui avait déjà affiché une perte nette de 1,47 milliard d'euros en 2011. Sans surprise, le conseil d'administration a décidé de ne pas proposer le versement d'un dividende, ce pour la deuxième année de suite également.
A la différence de 2011, où le groupe dans son ensemble était resté bénéficiaire, l'ensemble de la banque intégrant 100% des caisses régionales est également en perte, à 3,80 milliards d'euros.
Sur le seul quatrième trimestre, la perte nette de Crédit Agricole SA atteint 3,98 milliards d'euros, un montant plus lourd que celui attendu par le consensus d'analystes établi par l'agence Bloomberg, qui tablait sur 3,69 milliards.
La banque a choisi de passer sur les trois derniers mois de l'année une rafale d'éléments exceptionnels avec, à la clef, une note de plus de 4,5 milliards d'euros.
Il y a d'abord eu la Grèce, avec la cession définitive à un autre établissement hellène, Alpha Bank, de la filiale Emporiki, devenue depuis plusieurs années le boulet du groupe. La perte enregistrée sur cette vente atteint 706 millions d'euros.
Pour ne rien arranger, l'administration fiscale a indiqué mardi seulement à la banque qu'elle ne pourrait pas déduire cette perte de son résultat imposable. Cette décision alourdit la facture de 838 millions d'euros, a indiqué le directeur financier, Bernard Delpit.
"Notre présence dans ce pays nous a coûté cher", a commenté le directeur général, Jean-Paul Chifflet. "Nous avons pris une décision pour que ce moment marquant de la vie du groupe appartienne au passé", a-t-il ajouté.
Mais la Grèce n'a pas été l'élément comptable le plus marquant de cette fin d'année. La banque a, en effet, décidé de déprécier pour 2,67 milliards d'euros d'écarts d'acquisition (goodwill), qui rappellent la première moitié des années 2000, traversée avec un appétit féroce pour les acquisitions de tout poil.
Les écarts d'acquisition représentent la différence entre le montant payé pour acquérir une société et la valeur comptable de ce même actif. Comme beaucoup d'autres à cette époque, le Crédit Agricole a acheté des actifs au prix fort, porté par une conjoncture euphorique.
D'autres ajustements ont été effectués pour que les comptes de la banque ne portent plus les stigmates d'une époque révolue.
"Nous avons tourné la page et profondément transformé le groupe", a déclaré M. Chifflet.
Cette purge n'a pas affecté la solidité financière du groupe, qui affiche un ratio de fonds propres "durs" (apports des actionnaires et bénéfice mis en réserve rapportés aux crédits accordés) de 9,3% selon le mode de calcul du nouveau cadre réglementaire Bâle III, qui ne sera pleinement effectif que fin 2018.
La banque confirme viser un ratio supérieur à 10% fin 2013.
En marge de la publication de ses résultats, Crédit Agricole SA a également annoncé le lancement d'un nouveau plan portant sur l'informatique, les achats et l'immobilier qui doit permettre d'économiser 650 millions d'euros sur l'ensemble du périmètre de la structure cotée.
Après cette exercice sacrifié, le groupe entend se tourner vers l'avenir et prépare son nouveau plan stratégique, qui sera présenté fin 2013.
"En ce début 2013, le Crédit Agricole est en ordre de marche pour délivrer une performance financière durable", a affirmé M. Chifflet.