Les patrons des cafés-restaurants, critiqués pour ne pas avoir assez fait profiter les consommateurs de la baisse de la TVA de 19,6% à 5,5%, peinent aussi à convaincre la plupart des syndicats de salariés qu'ils en feront en revanche largement bénéficier leur personnel.
Dix-sept heures de négociations dans la nuit de lundi à mardi ont débouché sur un accord salarial au petit matin signé par seulement deux syndicats sur cinq (CFDT et CFE-CGC) mais refusé par les trois autres (CGT, FO, CFTC), ce qui risque d'empêcher sa mise en oeuvre.
Légalement, un accord social ne peut en effet entrer en application si une majorité de syndicats s'y opposent, ce qui sera le cas si CGT, FO, et CFTC, font jouer leur droit d'opposition. CGT et FO ont annoncé mardi qu'elles allaient le faire. La CFTC a indiqué qu'il en sera "très probablement" de même pour elle.
Une des principales dispositions de l'accord est le versement pendant trois ans, à compter du 1er juillet, d'une prime annuelle égale à 2% du salaire annuel brut et plafonnée à 400 euros.
Mais sur les 800.000 salariés du secteur, les saisonniers sont exclus de la prime, soit 200.000 personnes selon les syndicats non signataires, ainsi que les salariés de moins d'un an d'ancienneté. En outre, seuls les salariés des cafés-restaurants ne la percevront qu'en totalité. Ceux des hôtels, où la baisse de la TVA ne concerne que les petits-déjeuners, en recevront 25% et ceux des hôtels-restaurants 50%.
L'accord prévoit aussi une revalorisation moyenne de la grille des salaires de 6% (mais qui correspond à des hausses réelles inférieures, beaucoup de niveaux salariaux étant jusque là inférieur au Smic), la garantie que son premier niveau soit supérieur au Smic, le rajout de deux jours fériés supplémentaires, ainsi que la mise en place d'une mutuelle de santé.
Ce texte "historique" représente "un milliard d'euros de pouvoir d'achat pour les salariés" et avec les charges, 1,35 milliards de coût pour les employeurs, ont souligné mardi les signataires, chiffre contesté par les trois contestataires.
"Je ne vois pas de quel droit un syndicat priverait ses salariés d'une prime de Noël de 400 euros", a tonné André Daguin, côté patronal, en anticipant quelque peu la date de versement, prévue en juillet. André Daguin affirme être président par intérim de la principale organisation patronale, l'Umih, dont la présidente, Christine Pujol, est contestée.
"Les syndicats qui ne croient pas bon de signer et d'en faire profiter les salariés devront en rendre compte à ces salariés", a estimé Doudou Konate (CFDT).
"Si le patronat accepte la prime de 2% pour tous, nous sommes signataires", a rétorqué Michel Jeanpierre (CFTC). "Sur le reste du texte, à quelque chose près, nous sommes assez proches des organisations patronales", a indiqué Denis Raguet (FO).
Stéphane Fustec (CGT) a exprimé son espoir d'obtenir gain de cause. "Nous n'aurons jamais un tel rapport de forces favorable", a-t-il dit, en faisant allusion à la polémique sur la baisse de la TVA.
Interpellant le gouvernement, les syndicats non signataires ont l'intention de déposer symbloiquement au ministère du Travail un contre-texte.
Mais le secrétaire d'Etat au Commerce Hervé Novelli a jugé que l'accord comportait des avancées "indéniables" et a demandé aux trois syndicats de ne pas s'y opposer.
Si un terrain d'entente n'est pas trouvé, l'accord ne pourra pas être imposé à toutes les entreprises du secteur, et pourrait se traduire par de simples recommandations des organisations patronales à leurs adhérents.