Les Européens ont continué mercredi à se diviser sur les réponses à apporter à la crise financière et la façon de mener le débat, alors que le FMI a tiré la sonnette d'alarme sur la situation "très préoccupante" de la zone euro.
Le débat sur l'introduction d'obligations européennes s'est envenimé mercredi, le chef de file des ministres des Finances de la zone euro Jean-Claude Juncker reprochant à Berlin une attitude "anti-européenne".
"On rejette notre proposition avant même de l'avoir étudiée. (...) Cette façon de créer en Europe des sujets tabous et de ne pas du tout s'occuper des idées des autres est une manière très anti-européenne de gérer les affaires", a dit le Luxembourgeois, dans un entretien à paraître dans l'hebdomadaire allemand Die Zeit jeudi.
Une critique très mal reçue par les responsables allemands.
"Je réponds à cela que nous travaillons calmement et qu'il ne faut pas perdre de vue l'objectif de vendredi prochain", a rétorqué la chancelière Angela Merkel.
Les chefs d'Etat et de gouvernement se réunissent jeudi et vendredi prochain à Bruxelles, pour un sommet consacré principalement à la crise.
Le porte-parole de Mme Merkel, Steffen Seibert, avait plus tôt vertement critiqué M. Juncker en estimant que "cela n'aidait pas l'Europe si ses membres se qualifiaient les uns les autres d'anti-européens".
"Il n'y a pas que l'Allemagne à qui (cette proposition) cause des problèmes, on entend aussi ce son de cloche dans d'autres pays membres", a-t-il par ailleurs déclaré.
M. Juncker a plaidé lundi avec le ministre italien des Finances Giulio Tremonti pour la création d'"euro-obligations", des emprunts lancés en commun par plusieurs Etats pour mutualiser les risques.
Mais, lors d'une réunion lundi, les ministres des Finances de la zone euro n'ont pas réussi à s'entendre sur des solutions plus radicales face à la crise, telles que ces euro-obligations.
Avant même la réunion, Mme Merkel avait fait savoir son opposition. L'Allemagne juge l'idée contraire aux principes fondateurs européens, selon lesquels chaque pays est responsable de sa politique budgétaire et économique. Des euro-obligations feraient aussi grimper les taux de refinancement de la première économie européenne.
"Entre autres choses, la zone euro a besoin de discipline verbale", a commenté le vice-président de la Commission européenne Joaquin Almunia, interrogé sur cette passe d'armes entre M. Juncker et l'Allemagne.
Ces nouvelles tensions interviennent alors que le directeur général du FMI Dominique Strauss-Kahn a tiré la sonnette d'alarme mercredi.
Il a prévenu qu'"aujourd’hui, les conséquences de la crise sont loin d’être épuisées, la situation en Europe reste très préoccupante, l’avenir est plus incertain que jamais".
Concernant la résolution des crises, "on a bien vu comment les épisodes grecs puis irlandais montrent qu'en Europe est loin d'être tout à fait au point", a-t-il notamment dit lors d'une intervention à Genève.
Les pays de la zone euro n'ont pas non plus réussi lundi à se mettre d'accord sur une augmentation de leur Fonds de secours pour les Etats en difficulté, malgré des appels en ce sens de M. Strauss-Kahn.
Il est doté actuellement de 440 milliards d'euros de garanties de prêts des pays de la zone euro, complétés par 250 milliards d'euros de prêts du Fonds monétaire international et par 60 milliards d'euros de prêts de l'UE.
"Je crois que si la zone euro ne se ressaisit pas suffisamment vite, elle risque d'avoir des périodes des croissance lentes, difficiles", a insisté M. Strauss-Kahn. Il a appelé à "une plus grande coopération" politique entre les pays de la zone euro.