Qui emportera la mise du Club Med ? La guerre des gros sous est engagée en Bourse, au lendemain de l'annonce d'une contre-OPA de l'Italien Andrea Bonomi pour torpiller l'offre déjà sur la table du tandem franco-chinois Ardian-Fosun.
La cotation du titre, suspendue lundi le temps que M. Bonomi détaille ses intentions, a repris mardi midi. L'action a grimpé en moins de dix minutes à 21 euros, puis dépassé ce seuil qui correspond exactement au montant proposé par l'homme d'affaires milanais.
Vers 16H00, la valeur prenait 9,69% à 21,40 euros, dans un marché en hausse de 0,53%.
"Coter au-dessus de 21 euros, c'est un peu surprenant. Cela montre que certains investisseurs attendent sûrement un relèvement de l'offre et que d'autres adhèrent à la vision à long terme de Bonomi pour le Club Med", a dit à l'AFP un courtier parisien.
L'offre, qui valorise Club Med à 790 millions d'euros, contre moins de 600 millions pour celle d'Ardian-Fosun, est jugée généreuse. "Même si une contre-offre était largement attendue, elle nous surprend par son ampleur", souligne Oddo Securities dans une note.
Le courtier Gilbert Dupont juge le prix offert par l'Italien "attractif compte tenu de la prime proposée, du contexte sectoriel compliqué (au 15 mai 2014, les réservations d’été ressortent en baisse de -3%), d’un développement en Chine probablement ralenti à court terme si Fosun se retire du capital".
Reste à savoir si Fosun et Ardian vont ou non relever leur prix, qui est de 17,50 euros par action, pour surenchérir. Et si les membres du conseil d'administration de Club Med, qui devaient se réunir mardi, vont ou non adhérer au projet du Milanais.
"Ardian ne veut probablement pas remonter son offre, parce que le Club Med n'a qu'un intérêt stratégique limité pour lui. C'est différent pour Fosun, pour qui le Club Med représente un développement en Chine et une marque forte en portefeuille", déclare à l'AFP un expert du secteur.
"Tous les regards sont désormais braqués vers Fosun", résume dans une note un analyste parisien.
-'Liste au Père Noël'-
De nombreuses voix jugent possible que Fosun souhaite s'accrocher à Club Med, avec ou sans Ardian.
La contre-offre de M. Bonomi a été formellement déposée lundi par la société Global Resorts SAS qui est chapeautée par le groupe Investindustrial de M. Bonomi. Le projet s'appuie sur plusieurs partenaires du secteur du tourisme.
M. Bonomi, qui détient déjà 10,56% de Club Med, doit financer 720 millions d'euros, dont 475 qu'il compte apporter sur fonds propres. Un montage jugé très solide par les experts du marché.
Mais les avis restent partagés sur l'ambitieux projet industriel de M. Bonomi, qui prévoit 150 millions d'investissements, avec le développement de 6 nouveaux villages en quatre ans dont trois en Asie, une focalisation accrue sur la France, une meilleure valorisation des villages 3 Tridents (moyenne gamme) et des développements en Europe comme en Amérique.
"Ca ressemble à une liste de jouets pour le Père Noël. On écrit tout mais on ne sait pas vraiment ce qui sera faisable", estimait un expert du secteur.
Pour un autre, "ce plan est très ambitieux dans le contexte actuel". "Si cela marche, ça peut aussi donner une chance au Club Med de muer pour devenir l'un des meilleurs spécialistes des loisirs et des resorts. Mais c'est une gageure industrielle, car il est difficile d'opérer un éventail aussi large que ce qui est présenté là".
Dans l'entourage du financier italien, on affichait sa confiance mardi. "La spécialité de M. Bonomi est de reprendre des marques en manque de souffle et de les propulser en terme de croissance et de développement", disait-on.
Avant de se lancer, l'Italien a mis les formes en sollicitant tous les ministères et l'Elysée.
Ce qui importe au gouvernement, expliquait lundi une source gouvernementale à l'AFP, c'est d'aboutir "à un projet pérenne, créateur d'emplois et assurant le rayonnement international du tourisme à la française pour ce groupe qui est un fleuron du secteur".