La Société Générale a publié mercredi un bénéfice annuel quasiment sextuplé grâce, entre autres, à la maîtrise des foyers de pertes qui lui avaient tant coûté ces trois dernières années, des actifs toxiques aux crédits impayés à l'étranger.
Les 3,9 milliards d'euros de bénéfice net de 2010 restent encore à bonne distance des millésimes exceptionnels de 2005 et surtout 2006, mais ils ont "confirmé la capacité de rebond du groupe", selon son PDG Frédéric Oudéa.
Intronisé au printemps 2009 à la tête de la banque en remplacement de l'emblématique Daniel Bouton, M. Oudéa avait présenté 2010 comme une année charnière.
Le pari est globalement tenu, en grande partie grâce au redressement de la banque de détail à l'international et à la stabilisation du portefeuille d'actifs à risque.
En 2009, Société Générale avait payé cher sa forte présence en Europe centrale et de l'Est, dont beaucoup d'économies avaient été torpillées par la crise.
La banque a bénéficié l'an dernier d'une amélioration de la conjoncture dans beaucoup des pays de la zone et procédé à des remaniements, qui se sont traduits par des fermetures d'agences et par une sélection plus stricte des crédits.
Symbole de l'embellie, la Russie, qui doit devenir le premier contributeur étranger au résultat en 2015, a renoué avec la rentabilité au quatrième trimestre 2010, après avoir perdu 461 millions d'euros depuis début 2008.
L'autre plaie de la banque, le portefeuille d'actifs à risque, est aussi en train de se refermer.
Ces actifs, dont la valeur nominale atteint encore 33 milliards d'euros, ont coûté à l'établissement de La Défense 5,2 milliards de résultat en 2008 et 2009.
En 2010, la perte nette s'est limitée à 474 millions, quatre ans après l'explosion du "subprime", qui a rendu indésirables les titres de ce portefeuille.
La stabilisation du portefeuille a permis à la banque de financement et d'investissement, où il est logé, de tripler quasiment sa contribution aux bénéfices.
Avec la banque de détail en France, elle pèse plus de 75% des profits du groupe.
Le marché a bien accueilli ces résultats, le titre Société Générale s'envolant mercredi de plus de 5% en milieu d'après-midi, pour finir en hausse de 4,86% à 51,24 euros.
Plusieurs analystes se montraient néanmoins réservés sur la qualité des résultats du quatrième trimestre, qualifiés de "mitigés" par Jean-Pierre Lambert de Keefe, Bruyette and Woods.
"Le titre monte parce que malgré des résultats qui ne sont pas terribles, ils maintiennent leurs perspectives", a expliqué un autre analyste, sous couvert d'anonymat.
La banque a, en effet, confirmé qu'elle visait bien un bénéfice net de 6 milliards d'euros en 2012, conformément à son plan stratégique, présenté en juin.
Frédéric Oudéa maintient également l'objectif d'un rendement des fonds propres (ROE) après impôt de 14 à 15% en 2012, contre 9,8% en 2010.
"Toutes les entreprises industrielles visent une rentabilité sur capital de 15%. Il n'y a pas de raison que le secteur bancaire ne soit pas traité comme les autres", a lancé le PDG.
"Je ne vois pas trop comment ils vont y arriver", a commenté un analyste, en évoquant les nouvelles contraintes réglementaires, dites Bâle III, qui entreront en vigueur début 2013 et vont alourdir les coûts des banques.
Pour atteindre ses objectifs, Société Générale entend donner "priorité à l'organique" et écarte des acquisitions significatives.
"Je ne vois pas grand chose se passer" dans le secteur bancaire européen durant les mois à venir, a annoncé M. Oudéa, qui n'envisage que des consolidations entre acteurs d'un même pays, comme celles qui interviennent actuellement en Espagne.