La holding Altice, maison mère du câblo-opérateur Numericable, est montée au créneau mardi pour défendre son projet de rachat de SFR et contrer l'offensive de Bouygues, dont l'offre rivale part favorite pour emporter la mise avec le soutien du gouvernement.
Pour la première fois depuis son dépôt la semaine passée, Altice a confirmé officiellement les détails financiers de sa proposition de reprise de la filiale télécoms de Vivendi, qui souhaite se désengager.
La holding de Patrick Drahi, qui lorgne depuis deux ans sur cette acquisition, est prête à payer à Vivendi un montant total de 10,9 milliards d'euros, assorti de 32% du capital de ce que serait un nouvel ensemble Numericable-SFR.
Ses dirigeants se disent "convaincus qu'elle est la plus attractive" pour Vivendi et l'ensemble du secteur des télécommunications.
"Le rapprochement de SFR et de Numericable est le seul véritable projet permettant d'accélérer le développement de la fibre et du très haut débit sur l'ensemble du territoire, tout en apportant des engagements réels et crédibles aux salariés, aux consommateurs et aux entreprises françaises du secteur des télécoms", ont-ils fait valoir mardi.
Tentative de pression ou au contraire baroud d'honneur face à un rival qui met le paquet depuis plusieurs jours pour s'assurer la victoire, Altice a fixé une date limite à la fin de cette semaine pour son offre, "valable jusqu'au vendredi 14 mars", selon un communiqué.
La maison mère de Numericable fait face à un adversaire de poids avec Bouyugues, désireux de marier SFR à sa filiale Bouygues Telecom contre 10,5 milliards d'euros et 46% du capital du tandem à Vivendi.
Sorti du bois après Altice et donné perdant au départ, Bouygues semble avoir retourné la situation en multipliant depuis quelques jours les engagements.
Pour échapper à un rejet sur les problèmes de concurrence, il a engagé des négociations en vue de céder, s'il est retenu, son réseau d'antennes et des fréquences de téléphonie mobile à son concurrent Free Mobile (Iliad).
- La baisse des prix, un acquis "irréversible" -
Bouygues redouble également de promesses sur des investissements massifs et le développement de l'emploi, "notamment en relocalisant" des services aujourd'hui assurés depuis l'étranger.
Il s'est assuré par ce biais un soutien du gouvernement, qui n'allait pas nécessairement de soi face à une opération qui, en cas de succès, révolutionnera le paysage français des télécoms en ramenant de quatre à trois le nombre d'opérateurs mobile.
Partisan de la logique industrielle, le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg s'efforce de prévenir l'inquiétude affichée par les associations de consommateurs.
"Le moment est venu d'organiser la renaissance du secteur des télécoms. Je ne crois pas que ça se fera au détriment des consommateurs", a-t-il défendu mardi sur RTL.
Selon M. Montebourg, la baisse des prix de la téléphonie mobile, chiffrée à 30% en deux ans, constitue un "acquis irréversible".
"Le scénario le plus favorable, à la fois pour les consommateurs, le marché et pour la France, c'est le scénario de Bouygues", défend lui aussi Xavier Niel, qui aurait tout à gagner à récupérer le réseau Bouygues Telecom.
Le fondateur d'Iliad, la maison mère de Free, est prêt à débourser pour cela jusqu'à 1,8 milliard d'euros.
La balle est désormais dans le camp de Vivendi, appelé à trancher dans les jours qui viennent.
"Il nous semble y avoir plus de synergies entre SFR et Bouygues qu’entre SFR et Numericable", assure un analyste de la place parisienne. "Toutefois, Bouygues devra peut-être relever son offre. Bouygues et Numericable ont tous les deux besoin de faire cette opération et pourraient être amenés à faire une offre trop élevée", estime-t-il.
A la Bourse de Paris, peu après 14H00, le titre Numericable perdait 3,82% à 23,95 euros, tandis que celui de Bouygues montait de 0,47% à 32,84 euros, dans un marché en légère baisse.