Le patron du géant italien de la défense Leonardo (ex-Finmeccanica), Mauro Moretti, a été condamné mardi à 7 ans de prison pour un accident de train qui avait fait 32 morts en 2009 lorsqu'il était à la tête des chemins de fer italiens (FS).
Le 29 juin 2009, un wagon-citerne rempli de GPL (gaz de pétrole liquéfié) avait déraillé puis explosé au moment où le train quittait la gare de Viareggio, sur la côte toscane, provoquant la désolation dans tout le quartier.
Dans ce jugement de première instance qui devrait faire l'objet d'un appel, M. Moretti a été reconnu coupable essentiellement d'homicide et blessures multiples par imprudence, tout comme Michele Mario Elia, l'ancien patron de Rete Ferroviaria Italiana (RFI), filiale de FS qui gère le réseau, condamné à 7 ans et six mois de prison.
La responsabilité de FS n'a cependant pas été retenue et c'est pour son rôle au sein de RFI que M. Moretti a été condamné.
Le conseil d'administration de Leonardo a confirmé dans la soirée "à l'unanimité sa pleine confiance" à M. Moretti.
Ce dernier conserve sa "pleine capacité" à exercer ses fonctions, a notamment assuré le conseil d'administration dans un communiqué.
En septembre, le parquet avait requis 16 ans de prison contre M. Moretti et 15 contre M. Elia, en dénonçant "la superficialité, les machines obsolètes et les contrôles incorrects. En quelques mots: la banalité du mal".
Aucun des deux hommes n'était présent à l'audience, où le verdict a été lu devant des chaises vides sur lesquelles avaient été posés des T-shirts frappés chacun du portrait d'une victime.
Selon les médias italiens, l'affaire devrait d'ailleurs être frappée de prescription avant qu'ils aient épuisés tous leurs recours.
Le groupe FS a "pris acte" du verdict mais s'est refusé à tout commentaire avant la publication des attendus du jugement, a expliqué son porte-parole, Stefano Biserni, à l'agence Radiocor, tout en exprimant "ses condoléances et sa proximité avec les proches des victimes et avec tous ceux qui ont été touchés par cet épisode tragique".
- "Tout brûlait" -
Agé de 63 ans, M. Moretti a dirigé FS de 2006 à 2014, avant de prendre la tête de Finmeccanica (devenu Leonardo le 1er janvier) en mai 2014.
Contacté par l'AFP, le groupe Leonardo n'a pas fait de commentaire dans l'immédiat. A la Bourse de Milan, son titre a fini en recul de 2,3% à 11,92 euros.
Parmi les 31 autres personnes physiques et morales qui comparaissaient devant le tribunal de Lucques (centre), 10 ont cependant été acquittés, mais le tribunal n'a pas précisé ses motivations.
Dans la matinée, des dizaines de proches portant des portraits des victimes, ainsi que des survivants grands brûlés, avaient organisé une marche pour réclamer justice.
Roberto Piagentini, qui a perdu sa fils, sa belle-fille et ses trois petis-enfants, a raconté à la Stampa ses souvenirs de cette nuit de cauchemar: "Je n'arrivais pas à trouver la maison de mon fils. Derrière la gare, tout brûlait. Je hurlais de peur, tout s'était écroulé, la voiture était carbonisée".
"La peine la plus lourde reste pour nous", a expliqué à La Repubblica Claudio Menichetti, dont la fille Emanuela, 21 ans, très grièvement brûlée, a succombé après 42 jours d'agonie. "Pour nous c'est déjà la perpétuité".
L'accident ferroviaire de Viareggio a été le plus meurtrier en Italie depuis la collision en avril 1978 du Lecce-Milan avec le rapide Venise-Rome, qui avait fait 50 morts au sud de Bologne (centre).
Le 12 juillet, une collision entre deux trains régionaux circulant en sens contraire sur une voie unique, probablement à la suite d'une erreur humaine, a encore fait 23 morts dans les Pouilles (sud).