par Tom Perry
BEYROUTH (Reuters) - L'armée syrienne et les milices alliées du régime Assad ont poursuivi leur progression samedi dans l'offensive lancée contre Alep, grande ville du nord de la Syrie dont les rebelles occupent toujours la partie orientale, alors que la diplomatie américaine paraît impuissante à résoudre ce conflit.
Les forces gouvernementales ont pris le contrôle du camp d'Handarat à quelques kilomètres au nord de l'agglomération, marquant leur premier succès d'importance dans cette opération soutenue militairement par la Russie.
Selon des habitants sur place, les raids aériens sont d'une violence sans précédent, avec l'emploi de bombes d'une puissance inédite.
Le camp d'Handarat, qui abrite des réfugiés palestiniens et surplombe l'un des principaux axes routiers menant à la ville, était tenu par les insurgés depuis des années.
"Handarat est tombé", a reconnu un membre de l'insurrection présent dans Alep, information confirmée par l'armée syrienne qui a précisé qu'un "grand nombre de terroristes" avaient été tués.
Depuis l'annonce de l'offensive jeudi par le régime de Damas, des dizaines de personnes ont été tuées, enterrant les derniers espoirs de ranimer un cessez-le-feu péniblement mis au point par la Russie et les Etats et que le gouvernement d'Assad a abandonné au bout d'une semaine.
Cet échec d'une médiation politique et la volonté du gouvernement syrien de jouer son va-tout contre la dernière grande ville où les rebelles sont encore présents marquent un tournant dans le conflit.
Le président syrien et ses alliés semblent plus déterminés que jamais à écraser la rébellion.
L'armée syrienne "accomplit de grands progrès dans sa guerre contre le terrorisme", a commenté le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al Moalem, devant l'Assemblée générale des Nations unies.
Le diplomate a accusé les Etats-Unis et leurs alliés d'être "complices" du groupe Etat islamique (EI) et d'autres "organisations terroristes armées".
Le pilonnage aérien, qui ne cesse de s'intensifier, a touché quatre zones tenues par les opposants dans la partie orientale d'Alep. Selon les rebelles, ces raids sont principalement menés par l'aviation russe.
PRENDRE ALEP EN UNE SEMAINE
Les pays occidentaux et les organisations humanitaires internationales ont fait part de leurs inquiétudes pour les quelque 250.000 civils qui se trouvent assiégés dans ces quartiers. L'armée syrienne affirme ne viser que les activistes.
Ammar al Selmo, chef de la Défense civile qui mène les opérations de secours dans la ville, a déclaré que plusieurs antennes de son organisation avaient été touchées. "Nos équipes essaient d'intervenir mais elles ne sont pas assez nombreuses pour faire face à l'ampleur de la catastrophe".
L'armée syrienne, appuyée par des milices iraniennes, irakiennes et libanaises, a progressivement encerclé les rebelles dans la partie Est d'Alep cette année afin d'imposer un siège complet doté du soutien aérien russe.
Le chef d'une milice irakienne pro-syrienne a déclaré à Reuters que l'objectif était la prise de la ville dans un délai d'une semaine.
Selon un diplomate occidental, la seule manière de parvenir à ce résultat dans un laps de temps rapide serait de détruire totalement les quartiers rebelles "dans une atrocité monstrueuse qui marquera des générations".
Interrogé sur la nature des armes employées lors de cette offensive, une source militaire syrienne a répondu que l'armement utilisé était "adapté à la nature des cibles visées et tenait compte des fortifications", tels que des bunkers ou des tunnels.
"La plupart des victimes se trouvent sous les décombres car la moitié de la Défense civile ne peut pas intervenir", a expliqué un responsable du Front du Levant.
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a établi un bilan de 72 tués depuis vendredi, dont cinq enfants, tandis qu'Ammar al Selmo avance un nombre supérieur à cent.
Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a déclaré qu'une nouvelle cessation des hostilités relevait de la responsabilité de toutes les parties en présence et pas seulement "de concessions unilatérales de la Russie".
"On ne peut parler d'une reprise de la trêve que sur une base collective", a-t-il déclaré dans un entretien à la chaîne de télévision Vesti samedi.
(Pierre Sérisier pour le service français)