par Pascale Denis
PARIS (Reuters) - LVMH et Hermès ont annoncé mercredi, à la surprise générale, avoir mis fin à l'ensemble de leurs contentieux après quatre ans d'une bataille homérique déclenchée par l'irruption du géant mondial du luxe au capital du sellier.
Ce accord, bouclé la semaine dernière grâce à la conciliation proposée en juillet par le président du tribunal de commerce de Paris, se traduira par la distribution par LVMH à ses propres actionnaires des 23,2% du capital d'Hermès qu'il détenait jusqu'ici, représentant 6,4 milliards d'euros au cours de Bourse de mardi soir.
"Une transaction a été signée aux termes de laquelle la totalité des actions Hermès détenues par le groupe LVMH seront distribuées à ses actionnaires, étant entendu que la société Christian Dior distribuera à ses propres actionnaires les actions qu'elle aura ainsi reçues", ont annoncé les deux groupes.
A l'issue des distributions d'actions, qui seront réalisées d'ici le 20 décembre, Groupe Arnault, holding familiale du PDG de LVMH et principal actionnaire de LVMH, détiendra environ 8,5% du capital d'Hermès.
LVMH, Dior SA, qui contrôle 40% de LVMH, et Groupe Arnault qui détient 70% de Dior SA, se sont engagés pour un délai de 5 ans à ne pas acquérir de nouvelles actions Hermès.
Les deux parties se sont félicitées de ce que "les relations entre les deux groupes représentatifs des savoir-faire français soient ainsi pacifiées".
En Bourse, l'action Hermès, privée de sa prime spéculative et qui retrouve 15% de flottant en plus, chute de 5,69% à 247,8 euros à 12h20, dans de gros volumes (plus de 13 fois leur moyenne quotidienne des trois derniers mois sur Euronext), tandis que LVMH gagne 2,8% à 136,75 euros.
Les analystes estiment que la plus-value économique réalisée par LVMH sur ses titres Hermès, acquis au prix moyen d'environ 100 euros, avoisine les 3,0 milliards d'euros, dont 1,0 milliard déjà comptabilisé dans les comptes du groupe.
LVMH avait créé la stupeur en annonçant en octobre 2010 détenir 14% du capital d'Hermès, une participation rapidement portée à 17% après le débouclage en actions d'instruments financiers (equity linked swaps) acquis en 2008.
Craignant une prise de contrôle rampante, la famille Hermès avait riposté en ajoutant un verrou supplémentaire au contrôle d'une entreprise en commandite, avec la création d'une holding familiale non cotée détenant la majorité du capital.
Hermès, qui a toujours contesté l'arrivé de LVMH dans son capital, la jugeant hostile malgré les dénégations répétées de Bernard Arnault, n'a jamais lâché la pression devant les tribunaux.
Le sellier avait porté plainte au pénal contre LVMH en septembre 2012 pour manipulation de cours, délit d'initié et complicité de délit d'initié puis l'avait assigné en juin 2013 devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir l'annulation pour fraude des instruments financiers (equity swaps) ayant permis la montée de LVMH à son capital.
A l'été 2013, l'Autorité des marchés financiers (AMF) avait estimé que LVMH avait masqué sa montée au capital d'Hermès et lui avait infligé une amende record de huit millions d'euros.
(Avec Gilles Guillaume, édité par Dominique Rodriguez)