PARIS (Reuters) - "Pas très convaincant", "président bulle", "prince de l'autosatisfaction" : l'opposition à Emmanuel Macron, de gauche comme de droite, a fustigé lundi le premier grand oral du chef de l'Etat au cours duquel il a affiché sa détermination à poursuivre la "transformation" du pays malgré les critiques.
La première grande interview télévisée du président en direct depuis son élection a été suivie par près de 9,5 millions de Français sur TF1 (PA:TFFP) et saluée par les membres du gouvernement et de la majorité comme "une parole forte et claire".
Soixante-et-un pour cent des Français interrogés à son issue par l'institut de sondage Harris Interactive ont eux déclaré ne pas être "convaincus" par cette prise de parole, qui survient au moment du lancement de son deuxième train de réformes sociales.
"Il n'y a eu rigoureusement aucune annonce et surtout ceux qui attendaient - je faisais partie de ceux-là - des précisions et des clarifications ont eu droit à la confusion et l'imprécision", a estimé le député européen Les Républicains (LR) Brice Hortefeux sur CNews, citant notamment la question de la procréation médicalement assistée (PMA).
"Il ne s'adresse ni au peuple de gauche ni au peuple de droite il s'adresse aux élites", a-t-il ajouté, épinglant un "prince de l'autosatisfaction".
Lors de cette interview, qui a duré un peu plus d'une heure et qui n'a pas abordé l'Europe et l'écologie, Emmanuel Macron a défendu ses cinq premiers mois de mandat et répondu aux critiques sur son style de présidence et sur sa politique socio-économique, perçue comme favorable aux plus aisés.
"Je n'aime pas la jalousie qui consiste à dire 'ceux qui réussissent on va les taxer, les massacrer parce qu'on ne les aime pas'", a-t-il notamment déclaré. De la même manière, "je n'aime pas le cynisme de parfois celles et ceux qui réussissent et qui se replient sur un égoïsme où le seul but de la vie serait d'accumuler de l'argent et donc ils doivent aussi s'engager dans la société en créant de l'emploi, de l'activité."
"IL VIT AVEC LES SIENS"
Emmanuel Macron est un "président qui vit avec les siens et qui ne comprend visiblement pas ce que sont les Français et qui ne les connaît pas", a réagi Olivier Faure, chef de file des députés Nouvelle Gauche (PS), sur France 2, qualifiant le chef de l'Etat de "président bulle".
"Par son parcours, en réalité, il ne les a jamais rencontrés que devant des caméras et donc ça se sent, ça se voit".
"Le voir décrire intervention après intervention les Français comme des fainéants (...) maintenant comme des jaloux, mais est-ce que vous pensez sérieusement que la femme de ménage, la caissière, le retraité, tous ces Français qui vivent de leur travail ou qui ont vécu de leur travail, sont vraiment des gens qui sont jaloux de ceux qui réussissent ?", a-t-il ajouté. "Ils demandent simplement justice."
Pour le secrétaire général des Républicains, Bernard Accoyer, le chef de l'Etat n'a pas été "très convaincant".
"S'il a été clair sur la justification des mesures prises sur l'ISF, sur la formation, à l'inverse, il y a des réponses qui sont soit absentes, soit inquiétantes", comme la hausse de la CSG, a-t-il estimé sur RTL. "C'est un choc fiscal macronien qu'il essaie de cacher mais qui va être dans quelques semaines une réalité".
Emmanuel Macron souhaite construire "une société nomade", a dénoncé de son côté la présidence du Front national Marine Le Pen dans un communiqué.
"Pousser les salariés à démissionner plus facilement en leur ouvrant le droit à l’indemnisation, forcer les chômeurs à travailler même loin de chez eux, traquer les épargnants appelés à placer leurs économies au casino, désigner comme cibles les propriétaires immobiliers, aller chercher le prétendu magot des offices HLM censés-selon son expression- détenir des rentes", énumère-t-elle.
(Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse)