La poussée de violences dans le monde arabe et particulièrement en Libye a fait trembler les Bourses mondiales, en net recul mardi, et flamber les cours de brut, sur fond de craintes d'approvisionnement en gaz et pétrole.
Tokyo (-1,78%), Hong Kong (-2,11%) et Shanghai (-2,62%) ont chuté en clôture. Les pertes sur les Bourses européennes ont été plus limitées: -1,15% à Paris, -0,30% à Londres et -0,05% à Francfort. Fermée la veille, la Bourse de New York reculait aussi, le Dow Jones perdant 0,89% et le Nasdaq 1,74% vers 17H00 GMT.
En Italie, partenaire économique très important de la Libye, la Bourse de Milan, qui avait chuté lundi de 3,59%, a cédé encore 1,06% à la clôture.
Première source de préoccupation: le pétrole, qui a atteint des niveaux inédits depuis 2008, en raison principalement de l'escalade meurtrière en Libye, l'un des principaux producteurs d'or noir en Afrique, qui fait peser une menace directe sur l'approvisionnement.
Les prix du pétrole ont fini sur une hausse de 8,5% à New York, à 93,57 dollars la baril. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord a atteint un pic à 108,57 dollars en séance, un sommet depuis septembre 2008.
"Si les troubles en Libye s'étendent au reste de la région, les prix du pétrole pourraient grimper à des niveaux record", a prévenu Torbjorn Kjus, analyste chez DnB NOR.
L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) accroîtra sa production si jamais une pénurie devait intervenir sur le marché du fait des mouvements de contestation au Moyen-Orient, a affirmé le ministre saoudien du Pétrole Ali al-Nouaimi. Les Etats-Unis ont appelé l'ensemble des pays producteurs à augmenter leur production en réponse à l'envolée des cours.
La situation dans le monde arabe a créé une réaction en chaîne au sein du monde économique. Outre la paralysie des économies des pays concernés -tourisme en berne, Bourses ou banques fermées-, elle touche de plein fouet les entreprises qui y sont implantées.
L'insurrection qui frappe la Libye a déjà commencé à freiner la production d'hydrocarbures du pays: le groupe pétrolier espagnol Repsol y a suspendu ses activités et l'italien ENI, premier producteur étranger d'hydrocarbures en Libye, a annoncé la suspension temporaire de "certaines" de ses activités de production de pétrole et de gaz.
Mais la crise en Libye frappe également les sociétés dans les secteurs du tourisme ou celles ayant de gros besoins pétroliers, à commencer par les compagnies aériennes.
A la Bourse de Paris, le titre du groupe Air France-KLM a chuté de 3,04%, pénalisé par l'envolée des cours du pétrole. Même chose à Francfort pour Lufthansa.
"Si les tensions se maintiennent il faudra que la compagnie (Air France-KLM) fasse payer au voyageur le surcoût lié à l'envolée de l'or noir", a averti un analyste parisien.
L'euro a reculé dans la matinée, avant de se stabiliser un peu en dessous de 1,37 dollar.
"Le marché est entièrement focalisé sur la situation au Moyen Orient et en Libye, où la situation est totalement incertaine", a déclaré Teppei Ino, analyste de Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ.
"Les investisseurs fuient les actifs risqués en raison des tensions en Afrique du Nord et au Moyen-Orient", a-t-il ajouté.
A l'inverse, les traditionnelles valeurs-refuge, comme l'or ou le franc suisse, ont connu une réelle ascension. Le marché obligataire s'est également légèrement détendu, profitant du recul des marchés actions.
Outre l'approvisionnement en pétrole, l'inquiétude qui pèse sur les économies mondiales est de voir les troubles au Moyen-Orient plomber la timide reprise, la hausse du brut entraînant une augmentation des prix des carburants, puis des prix en général, dans des pays à peine remis de la grave crise de 2008/2009.