Le monde des affaires britannique a mis en garde mercredi le Premier ministre conservateur David Cameron contre le risque d'"ouvrir la porte de sortie" de l'UE pour la Grande-Bretagne et d'introduire une incertitude néfaste pour une économie britannique convalescente.
Conscient des inquiétudes au sein du monde économique, David Cameron avait choisi de prononcer son discours très attendu sur l'Union Européenne devant un parterre composé notamment d'hommes d'affaires dans les locaux londoniens de l'agence financière américaine Bloomberg.
La "stratégie (de David Cameron) n'est pas sans risques", a averti Terry Scuoler, patron de l'EEF, organisation patronale regroupant les industriels britanniques.
"Si la porte vers la sortie de l'Union européenne est ouverte pour la Grande-Bretagne, cela diminuera notre capacité à influencer les réformes dont l'Europe a besoin", a-t-il mis en garde.
La perspective d'un référendum sur l'appartenance à l'UE, promis par M. Cameron, "ajoute à l'incertitude", a regretté pour sa part le patron du groupe publicitaire WPP, Martin Sorrell, qui figurait parmi les grands patrons signataires d'une lettre ouverte publiée le 9 janvier par le Financial Times.
Ils y appelaient David Cameron à ne pas mettre "en danger" l'adhésion de la Grande-Bretagne à l'UE.
"Nous ne savons même pas si nous serons en mesure de renégocier ou non (...) Tout ce qu'on fait c'est ajouter une raison de plus de repousser les décisions d'investissement. La dernière chose dont nous avons besoin, c'est de voir les décisions davantage repoussées", a-t-il jugé depuis Davos où est réuni le gratin de la finance internationale.
"La sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne, ça n'arrivera pas. Comment voulez-vous qu'un pays qui fait plus de 50% de ses échanges avec l'Europe puisse se retirer, tout ça n'est que de la politique", a renchéri le patron de l'une des plus grandes entreprises britanniques, préférant rester anonyme.
D'autant plus que l'économie britannique, tout juste sortie de la récession cet été, s'est probablement contractée de nouveau fin 2012.
Même son de cloche du côté de l'organisation représentant le centre financier de la City de Londres, primordial pour l'économie britannique.
"La position de Londres en tant que premier centre financier et d'affaires d'Europe est crucial pour soutenir la croissance et l'emploi au Royaume-Uni mais aussi sur l'ensemble du continent", a jugé Mark Boleat de la City of London Corporation.
"L'incertitude sur la relation avec l'Europe risque de faire du Royaume-Uni un pays moins attractif (...) C'est pourquoi le Royaume-Uni doit rester un membre à part entière du marché unique, tout en continuant à avoir un accès total au processus de décision qui fixe les règles pour le marché unique", a-t-il poursuivi.
Sortir de l'UE, tout en restant membre du marché unique, aurait en effet un impact très négatif pour la place de Londres car le gouvernement britannique ne serait plus en mesure de défendre les intérêts de la City lors de la mise au point de la réglementation européenne comme il a pu le faire récemment pour l'union bancaire.
Tout en soulignant les risques pour l'économie, le monde des affaires britannique est toutefois d'accord avec David Cameron sur la nécessité de réformer en profondeur l'UE afin de gagner en compétitivité et de réduire une réglementation européenne vue de ce côté de la Manche comme un frein aux entreprises.
L'organisation patronale CBI a indiqué qu'elle allait "travailler étroitement avec le gouvernement pour obtenir le meilleur accord pour la Grande-Bretagne".
"La Grande-Bretagne doit être derrière" Cameron, "si nous pouvions empêcher Bruxelles de décider de tout", cela permettrait de "réduire la bureaucratie, d'être beaucoup plus flexible, compétitif", selon Charlie Mullins, patron de l'entreprise de plomberie Pimlico Plumbers, qui assistait au discours de M. Cameron.
La Bourse de Londres est en revanche restée insensible au discours de M. Cameron, clôturant en hausse de 0,3% mercredi soir.