par Jean-Baptiste Vey
LUXEMBOURG (Reuters) - Le ministre français des Finances, Michel Sapin, a ouvert la porte lundi à une modification des projets de budgets de la France pour 2015 pour réduire davantage les déficits publics.
Jusqu'à présent, il avait déclaré qu'il n'y aurait pas davantage d'économies l'an prochain que les 21 milliards d'euros prévus pour l'instant, ni hausse de la pression fiscale.
Le débat parlementaire qui débute mardi et durera jusqu'à fin décembre laisse le temps de voir comment évolue la discussion avec la Commission européenne, qui examinera les budgets français à partir de mercredi, a-t-il dit lors d'une conférence de presse après la réunion des ministres des Finances de la zone euro à Luxembourg.
"Il y a du temps pour qu'à la fois les discussions soient positives mais aussi pour que les réflexions sur la situation économique de la zone euro mûrissent", a déclaré Michel Sapin.
Prié de dire si les amendements qui seront déposés par le gouvernement réduiront davantage les déficits qu'annoncé jusqu'à présent, il a répondu: "Nous verrons le sens des discussions, nous verrons où en sera la Commission et sa compréhension de nos chiffres."
La Commission européenne recevra les projets de budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale mercredi et dira par la suite s'ils respectent les règles européennes ou si la France doit procéder à des modifications.
Loin de ramener le déficit public à la limite européenne de 3% du produit intérieur brut l'an prochain, comme la France s'était engagée à le faire, les textes budgétaires prévoient qu'il atteindra encore 4,3% du PIB fin 2015.
Le déficit ne serait ainsi qu'à peine réduit par rapport à cette année, pour laquelle il est attendu à 4,4% du PIB au lieu de 3,8% prévu auparavant.
DES "SPÉCULATIONS PRÉMATURÉES"
Le dérapage est également important pour le déficit structurel (c'est-à-dire hors effet du cycle économique), une notion désormais essentielle dans l'analyse de la Commission.
Au lieu des 0,8 point d'ajustement structurel recommandés par la Commission, tant pour 2014 que pour 2015, la France n'en prévoit désormais que 0,1 point cette année et 0,2 l'an prochain, en expliquant ces écarts par des ajustements techniques et par la panne d'inflation.
Des sources européennes ont déclaré ces derniers jours que la Commission européenne devrait demander à la France, mais également à l'Italie, de modifier leurs budgets pour réduire davantage leurs déficits publics.
"Ces spéculations sont prématurées", a dit le futur vice-président de la Commission européenne chargé de l'emploi, de la croissance, de l'investissement et de la compétitivité, Jyrki Katainen, après la réunion de l'Eurogroupe à Luxembourg.
"Aucune décision n'est prise à ce stade."
Jyrki Katainen n'a pas cité de pays en particulier mais c'est la France, deuxième économie de la zone euro, qui concentre l'interrogation des responsables européens.
Le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, qui avait jugé vendredi insuffisant le projet de budget de la France, a déclaré lundi que "les chiffres que nous entendons de Paris ne sont pas très prometteurs. C'est sans aucun doute un sujet de préoccupation".
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, s'est quant à lui dit "confiant" qu'une solution puisse être trouvée dans le cas de la France, tout en mettant en garde contre une modification des règles budgétaires. "Les règles européennes sont là pour qu'on les respecte", a-t-il dit.
(Avec John O'Donnell et le bureau européen de Reuters, édité par Marc Angrand)