Le salon de Dubaï ouvre ses portes dimanche avec Boeing à l'offensive sur le marché des long-courriers mais l'européen Airbus espère contenir l'avalanche de méga commandes, dont celle attendue d'Emirates Airline pour le nouveau 777-X de son rival américain.
Si au Bourget en juin, les deux géants incontestés de l'aéronautique avaient terminé au coude à coude en terme de contrats engrangés, les analystes s'attendent plutôt à un "show Boeing".
Car celui-ci doit officiellement lancer à Dubaï son 777-X, long-courrier qui sera doté de nouveaux moteurs moins énergivores et d'ailes en composite. Peut-être dès dimanche. Cet appareil doit remplacer en 2020 l'actuel "Triple 7", un des best-sellers de l'avionneur qui avait été lancé en 1990 et commercialisé cinq ans plus tard. Celui-ci a été vendu à 1.473 exemplaires au 12 novembre.
Le 777-X est une réponse à l'arrivée en 2017 de l'A350-1000, version allongée du futur long-courrier en composite d'Airbus capable d'emporter 350 passagers et qui menace la prédominance de Boeing sur le marché très lucratif des avions long-courriers. Avant même son lancement officiel, "de nombreuses compagnies ont manifesté leur intérêt pour cet appareil", souligne Yan Derocles, analyste chez Oddo Securities.
A commencer par Emirates, puissante compagnie de Dubaï dont le président Tim Clark a indiqué dès fin octobre au quotidien britannique Financial Times, qu'il négociait une commande "substantielle" de 777-X. Le FT évalue entre 100 et 175 unités les besoins du transporteur pour cet appareil qui comportera quelque 400 sièges.
La presse spécialisée évoquait ces derniers jours un potentiel de 250 commandes en ajoutant celles des autres compagnies.
Le Moyen-Orient, des perspectives de croissance énormes
"Je ne vois pas Airbus rester les bras croisés en comptant les commandes de Boeing", estime toutefois un expert du secteur qui a requis l'anonymat. "Dimanche sera une belle journée pour Airbus. Il devrait faire des annonces significatives pour son A350 et son Neo (version remotorisée du moyen-courrier A320)", affirme de son côté une source industrielle.
Christophe Ménard, analyste chez KeplerCheuvreux, note en outre que le salon de "Dubaï est le dernier grand rendez-vous aéronautique de l'année et que les avionneurs ont à coeur de bien la terminer".
Pour l'heure, Airbus devance son rival Boeing avec 1.215 commandes nettes de janvier à fin octobre contre 957 commandes pour Boeing au 5 novembre.
La bataille des deux constructeurs devrait par ailleurs profiter au salon de Dubaï qui se tient tous les deux ans. "Il pourrait avoisiner voire dépasser" le record de 2007, estime Jean-Louis Dropsy, expert aéronautique au cabinet Kurt Salmon. Les ventes avaient alors atteint 155 milliards de dollars, "un record de vente pour un salon aéronautique", dit-il.
"Les seules commandes de 777 et de 787 pourraient s'élever, selon lui, à 80 ou 100 milliards de dollars, auxquelles s'ajouteraient celles potentielles d'Airbus, de jets d'affaires, etc.", selon lui.
En valeur, il dépasserait ainsi le Bourget et ses 115 milliards de commandes et d'intentions d'achats.
Boeing comme Airbus n'ont eu de cesse de répéter ces derniers jours que le Moyen-Orient était devenu un marché clé pour le secteur avec des perspectives de croissance gigantesques: le trafic aérien devrait y croître de 7,1% par an entre 2013 et 2032 contre 4,7% à l'échelle planétaire.
Le salon profite en outre de la rivalité des trois grandes compagnies du Golfe, Emirates, Etihad et Qatar Airways. Les deux premières ont donné le ton dès samedi en envoyant des invitations à la presse. Etihad y promet "de grandes annonces".
Ce salon "ne sert pas seulement à réaliser des ventes record d’avions, mais aussi à affirmer Dubaï comme le hub mondial d'excellence aéronautique", dit Jean-Louis Dropsy.
Enfin, commente-t-il, "les Emirats, dont le marché domestique est limité par leurs deux millions d'habitants, se servent de l'aéronautique comme d'un levier économique majeur pour développer le commerce et le tourisme. Comme autrefois le chemin de fer qui développait les villes par lesquelles il passait".