Angela Merkel s'est livrée jeudi à une charge en règle contre Donald Trump avant un sommet du G20 en Allemagne qui s'annonce houleux, en critiquant son cap protectionniste et son retrait de l'accord sur le climat.
Dans une déclaration à la chambre des députés sur cette réunion des principaux dirigeants de la planète la semaine prochaine à Hambourg, la chancelière allemande s'est gardée de citer le nom du président américain. Mais elle n'a pas laissé de doute sur sa cible.
Aucun des défis internationaux "ne connaît de frontière, c'est pourquoi, plus que jamais aujourd'hui, ceux qui croient pouvoir régler les problèmes du monde par le protectionnisme et l'isolationnisme commettent une énorme erreur", a-t-elle déclaré.
La chancelière s'est fixé comme objectif de la réunion, à laquelle participeront notamment les chefs d'Etat américain et russe, que "les dirigeants (du G20) montrent qu'ils comprennent leur responsabilité" pour la planète tout entière "et l'assument".
Les relations entre Berlin et Washington, au beau fixe sous l'ère Barack Obama, se sont envenimées depuis que son successeur à la Maison Blanche a annoncé le retrait de son pays de l'accord de Paris sur la lutte contre le réchauffement climatique et tient un discours protectionniste en matière commerciale.
- Divergences évidentes -
Donald Trump vise en particulier l'Allemagne et ses exportations automobiles vers les Etats-Unis et a laissé planer la menace de taxes douanières.
Sur le climat, "le désaccord (avec les Etats-Unis) est notoire et il ne serait pas honnête de le masquer. En tout les cas, moi je ne le ferai pas", a dit Angela Merkel.
L'Europe est "plus déterminée que jamais" à combattre le changement climatique après le retrait des Etats-Unis de l'accord de Paris, et cet accord n'est "pas négociable", a-telle encore réaffirmé.
Le sommet du G20 des principales économies mondiales, qui représentent trois quarts du commerce mondial, s'annonce comme une des réunions internationales les plus conflictuelles des dernières années.
Face aux sujets de discorde avec Washington, la chancelière allemande réunit jeudi en milieu de journée à Berlin plusieurs dirigeants européens, dont le chef de l'Etat français Emmanuel Macron et la Première ministre britannique Theresa May, afin de constituer un front uni.
Selon des diplomates, les travaux préparatoires du G20 pour aboutir à une déclaration commune se révèlent jusqu'ici "très difficiles".
Le chef de la diplomatie allemande Sigmar Gabriel accuse lui Washington de volonté de sabotage.
- 'Péninsule asiatique' -
"Il n'y a pas de stratégie anti-américaine, et certainement pas de la part du gouvernement allemand, mais il y a des stratèges américains qui planifient une politique anti-Europe et anti-Allemagne", a-t-il clamé mardi.
Compte tenu des difficultés avec Washington, Angela Merkel a aussi entrepris en vue du G20 de nouer des alliances sur les sujets du climat ou du commerce avec les puissances émergentes asiatique comme l'Inde ou la Chine. Ce qui ne l'empêche de se méfier des ambitions de Pékin.
Elle a mis en garde, dans une interview jeudi, contre l'expansionnisme économique de la Chine, qui considère à ses yeux l'Europe "comme une péninsule asiatique". "L'Europe doit travailler d'arrache-pied à défendre son influence", a-t-elle ajouté, apportant son soutien au projet de M. Macron visant à mieux défendre au plan européen les secteurs industriels stratégiques des appétits étrangers.
Ce soutien illustre la dynamique retrouvée dans la relation avec la France même si une forme de compétition pour le leadership en Europe se dessine entre les deux dirigeants.
Le chef de l'Etat français vient de réussir deux "coups" diplomatiques, en faisant venir le président russe Vladimir Poutine à Paris et en obtenant la venue de Donald Trump pour le 14 juillet.
Outre les divergences avec Donald Trump, d'autres sujets de conflits risquent de parasiter le G20.
Berlin a ainsi rejeté jeudi une demande du chef de l'Etat turc Recep Tayyip Erdogan de s'adresser à ses compatriotes en marge du sommet, dans un contexte très tendu entre les deux pays depuis des mois.