Le patronat a proposé lundi un mode de rupture "spécifique" du contrat de travail pour les salariés désireux de changer d'entreprise, proposition immédiatement rejetée par les syndicats qui souhaitent que le contrat soit seulement suspendu afin de sécuriser les mobilités.
La proposition patronale est tombée lors d'une quatrième et brève séance de négociation sur "la gestion sociale des conséquences de la crise" ramifiée en plusieurs groupes de travail, qui se retrouveront les 20, 21 et 22 janvier avant deux plénières le 12 février sur la mobilité, puis le 26 sur l'ensemble.
Pour "encourager la mobilité des salariés", le patronat voudrait instituer "un droit conventionnel prenant la forme d'un accord de mobilité professionnelle individuelle sécurisée".
Le contrat de travail serait "rompu du commun accord des parties", le salarié ayant "la possibilité de retrouver son ancien emploi ou un équivalent" pendant six mois, et plus si la période d'essai du nouveau poste excède 6 mois.
Si l'employeur embauche quelqu'un d'autre à sa place, supprime le poste, réduit les effectifs ou n'a plus d'emploi équivalent à proposer, dans ces quatre cas, le salarié ne serait pas réintégré mais pourrait s'inscrire au chômage comme après un licenciement et aurait droit à une demi-indemnité.
Les ruptures conventionnelles, qui se multiplient depuis l'été 2008, donnent droit à une indemnité complète.
Cette proposition a fait bondir les syndicats car elle "ne reprend rien" des suggestions syndicales (CGT) et est "moins favorable que ce qui existe déjà", notamment "moins bien que le congé sabbatique qu'il faudrait assouplir" (FO).
Autre pierre d'achoppement, le patronat exclut les petites entreprises, le seuil restant à fixer.
La législation serait modifiée "à titre expérimental" pour deux ans et pour les salariés ayant au moins deux ans d'ancienneté.
"On plane, on crée un nouveau droit avec rien dedans, juste sécurisant pour l'employeur", a protesté Stéphane Lardy (FO), qui a rejoint Maurad Rahbi (CGT) pour dire que "l'urgence" ou "la priorité des priorités" dans la négociation devrait aller à "la montée en flèche des chômeurs en fin de droits".
Selon une enquête TNS Sofres, réalisée en avril 2009 pour le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), 44% des mobilités professionnelles au cours des cinq dernières années ont été à l'initiative du salarié.
La majorité ont été suscitées par l'entreprise avec l'acceptation du salarié (28%) ou sous la contrainte (28%) par arrêt du contrat de travail, ou disparition du poste.
"Les modalités proposées ne nous conviennent pas", a réagi Gabrielle Simon (CFTC), pour qui "dans une mobilité sécurisée, il n'y a pas rupture du contrat de travail, mais sa suspension, comme dans le congé maternité".
"On souhaite une suspension du contrat de travail", a aussi exposé Laurence Laigo (CFDT), satisfaite d'avoir obtenu du patronat un accord pour que les représentants du personnel puissent suivre le dispositif.
"Je suis très fière au nom du patronat de proposer ce dispositif", a au contraire déclaré Dominique Castéra, DRH de Safran et chef de file de la délégation patronale.
"Cela permet à un salarié qui souhaite réaliser un projet dans une autre entreprise et n'ose pas, d'avoir un droit de retour, certes encadré, dans son entreprise initiale, et sinon de bénéficier d'une indemnité. Si le salarié a la conviction de faire quelque chose dans un nouveau cadre et que ça va marcher, c'est normal que ça démarre par une rupture du contrat" de travail, a-t-elle défendu.