NICE (Reuters) - A Nice, les métiers de l’un des plus fameux carnavals au monde n’échappent plus à la digitalisation avec l’utilisation inédite d’un robot capable de sculpter des décors et personnages géants de chars cinq fois plus vite que l’homme.
L’imposant bras blanc, articulé sur sept axes et muni de différents forets, s’attaque nuit et jour à d’immenses blocs de polystyrène qu’il rogne en quelques heures à la forme voulue dans une salle de hangar. Depuis son entrée en scène fin 2018, il façonne notamment les grosses têtes d'Emmanuel Macron, de l’ancien ministre de l’Environnement Nicolas Hulot caricaturé en Hulk ou encore des cinéastes Hitchcock et Chaplin, appelées à défiler sur la Baie des Anges du 16 février au 2 mars.
"Jusqu’à présent, c'était plutôt utilisé dans l’industrie, comme l’aéronautique, ou pour la coupe du marbre dans la région de Pise", constate Pierre Povigna, le carnavalier niçois à l’origine de ce pari technologique.
Chargé de réaliser onze chars sur les 17 de l’édition, il dit avoir investi "318.000 euros sans compter les ordinateurs". Une sacrée somme pour l’entreprise familiale qui espère bien "capter de nouveaux marchés" dans l’événementiel ou avec les artistes qui viendraient faire façonner leurs œuvres sur place.
Le métier de sculpteur qui assurait jusque-là le travail ne disparaît pas pour autant mais il évolue, concède-t-il.
"On ne débauche personne. Au contraire, on a recruté deux infographistes 3D", assure l’entrepreneur.
L’un d’eux, tout juste employé dans la société, Stéphane Biava, a d’ailleurs commencé sa carrière par la sculpture traditionnelle. Derrière des écrans, il modélise en 3D les visages, bras, jambes et autres décors, partis de photos et de croquis, puis programme le robot surveillé par des caméras.
Lorsque tout fonctionne, la machine sculpte, à une vitesse que l’homme ne peut concurrencer.
"On gagne beaucoup de temps, du coup on a presque fini à cette époque de l’année ce qui ne nous arrive jamais. On a par exemple fait en une semaine et demi un éléphant avec des détails incroyables qui nous aurait pris des mois sans ça", reconnaît l’un des sculpteurs à la main, Gérard Artufel.
L’homme estime cependant que son savoir-faire n’est pas menacé. "On a encore besoin de bons professionnels pour assembler les différentes parties des pièces entre elles comme la tête du roi qui en compte 25 ou réaliser les finitions."
Pour cette édition du carnaval de Nice, tout ne sera pas issu de l’infatigable bras armé. D’autres carnavaliers à l’ancienne s’attèlent en ce moment à croquer du lourd, à l’ancienne, en fabriquant, entre autres, Donald Trump géant en clown effrayant ou Vladimir Poutine.
(Matthias Galante, édité par Yves Clarisse)