par Agnieszka Flak , Elvira Pollina et Stephen Jewkes
ROZZANO, Italie (Reuters) - (Répétition du titre)
S'acheminant vers un échec annoncé, Vivendi (PA:VIV) a finalement retiré sa demande de remplacement de cinq administrateurs désignés par le fonds activiste Elliott au conseil de Telecom Italia (MI:TLIT), ouvrant ainsi la voie à un possible apaisement entre les deux parties.
Le groupe français, premier actionnaire de l'opérateur italien avec 24% du capital, et l'américain Elliott, qui en détient près de 10%, bataillent depuis plus d'un an autour de la stratégie de Telecom Italia et des moyens de redresser l'entreprise, engluée dans une dette de plus de 25 milliards d'euros.
Vivendi réclamait jusqu'à présent la mise à l'écart du président Fulvio Conti et de quatre autres administrateurs désignés l'an dernier par Elliott en leur reprochant un "manque substantiel d'indépendance".
Mais dans un geste indiquant une volonté d'oeuvrer à une possible trêve, Vivendi a proposé dans la journée de retirer sa demande, ce qui a été accepté à plus de 95% par les actionnaires de Telecom Italia, réunis en assemblée générale.
Luigi Gubitosi, administrateur délégué de Telecom Italia, a qualifié l'initiative de Vivendi de "courageuse" et Elliott s'est félicité de la décision du groupe français, tout en notant qu'elle résultait du fait que ce dernier avait pris acte du large soutien dont bénéficie le conseil actuel de TIM.
Le titre Telecom Italia a terminé sur un gain de 2,48% à la Bourse de Milan, alors que l'indice regroupant les valeurs télécoms européennes a perdu 0,50%. L'action Vivendi a pris de son côté 0,19%.
Elliott a pris le contrôle du conseil d'administration de TIM en mai dernier après une campagne de deux mois contre Vivendi, dont il contestait violemment la gestion.
LA GUERRE A COUTÉ CHER À TIM
Cette bataille entre les deux investisseurs a coûté cher à TIM, dont l'action a perdu un tiers de sa valeur l'an dernier. Elle a également entraîné le limogeage de son administrateur délégué Amosh Genish, proche de Vivendi, et son remplacement par Luigi Gubitosi, ancien administrateur appartenant au camp Elliott.
"Vivendi souhaite que le conseil d'administration de TIM reflète davantage la base actionnariale de l'entreprise et qu'il soit dirigé de manière indépendante, transparente et inclusive", a dit Caroline Le Masne de Chermont, directrice juridique de Vivendi, aux actionnaires.
Luigi Gubitosi a cependant déclaré que le conseil d'administration actuel, disposant d'un mandat de trois ans, ne serait pas modifié.
Cela a conduit Vivendi à dire par la suite qu'il allait veiller à partir de ce jour à ce que l'ensemble du conseil de TIM agisse dans l'intérêt de tous les actionnaires.
Elliott a pour part dit se réjouir de la perspective d'un "dialogue constructif avec tous les actionnaires pour suivre un chemin permettant une maximisation de la valeur pour Telecom Italia".
PEU DE CHANCES
Vivendi semblait avoir peu de chances d'obtenir gain de cause lors de cette assemblée générale, trois puissants cabinets de conseil aux actionnaires ayant incité ces derniers à voter contre sa résolution en évoquant le piètre bilan du groupe français lui-même, selon eux, en matière de gouvernance.
"TIM ne peut plus se permettre de retarder la résolution de ses problèmes opérationnels", a déclaré Emanuele Vizzini, directeur général du fonds d'investissement milanais Investitori Sgr.
Luigi Gubitosi a déclaré que de nombreux investisseurs partageaient sa conviction que les actionnaires devaient surmonter leurs divisions pour que "TIM puisse redevenir une entreprise normale".
TIM sous-performe ses homologues européens depuis des années. Il fait face à de nouveaux concurrents dans les réseaux haut débit et mobile alors que ses activités au Brésil ne se relèvent que lentement de la crise économique dans ce pays.
Dans son premier plan stratégique triennal dévoilé le mois dernier, Luigi Gubitosi s'est engagé à accélérer la baisse des coûts, à réduire la dette et à faire croître les bénéfices à partir de 2020.
La Cassa Depositi e Prestiti (CDP), qui est récemment montée à près de 10% du capital de Telecom Italia, devenant le deuxième actionnaire de l'opérateur, pourrait jouer le rôle d'intermédiaire entre les deux rivaux, dont le combat a déconcerté les investisseurs et le gouvernement.
Des sources au fait de la situation ont rapporté que l'établissement public italien discutait avec Vivendi afin de parvenir à une trêve avec Elliott.
Une telle trêve pourrait accélérer la création d'un réseau à haut débit unique en Italie via la fusion du réseau TIM avec son concurrent plus petit, Open Fiber. Ce projet, soutenu par la CDP, a toutefois été l'un des principaux points d'achoppement entre Vivendi et Elliott.
(Bertrand Boucey et Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)