par Jean-Baptiste Vey
PARIS (Reuters) - François Hollande et Manuel Valls ont défendu lundi le dialogue social face aux critiques et ont appelé les partenaires sociaux à de nouveaux compromis sur le chantier de la délicate réforme du Code du travail et sur le compte personnel d'activité.
Lors de la quatrième conférence sociale de son quinquennat, le chef de l'Etat a prôné l'apaisement et fait l'éloge des syndicats réformistes face aux attaques de Nicolas Sarkozy et à la colère de la CGT qui a boycotté la journée de travail.
Saluant la "responsabilité" des partenaires sociaux qui ont trouvé un accord vendredi sur les retraites complémentaires, le président français les a invités à parvenir à un compromis sur le futur compte personnel d'activité.
Après une table ronde sur le sujet, son rapporteur a annoncé que "le principe d'une négociation a été acté sous la forme d'un accord ou d'une position commune portant sur les principes, la méthode et le calendrier".
En permettant d'additionner les droits acquis dans les comptes de formation, les comptes pénibilité et les comptes épargne-temps, voire d'autres, le compte d'activité, qui suivra chaque personne toute sa carrière, doit apporter plus de sécurité en donnant notamment davantage accès à la formation.
La ministre du Travail, Myriam El Khomry, présentera fin octobre un document d'orientation pour qu'un compromis puisse intervenir mi-décembre, a dit François Hollande.
"Les échanges se poursuivront avec les régions au cours du mois de novembre et l'objectif, c'est que le projet de loi puisse être soumis Parlement dès le début de l'année prochaine", a-t-il ajouté. Son entourage avait auparavant précisé que l'exécutif souhaitait que le texte soit voté d'ici l'été.
Le projet de loi comprendra aussi la réforme du Code du travail, bien plus délicate politiquement.
ORIENTATIONS LE 28 OCTOBRE
François Hollande a seulement confirmé qu'il ne toucherait à aucun des chiffons rouges des syndicats (Smic, durée légale du travail, contrat de travail) et n'inverserait pas la "hiérarchie des normes" en faisant prévaloir le contrat sur la loi, laissant le soin à Manuel Valls d'apporter des détails.
Les orientations de cette réforme seront dévoilées le 28 octobre, a annoncé le chef du gouvernement, en ajoutant vouloir augmenter parallèlement les moyens des syndicats.
Il a précisé qu'il faudrait définir trois niveaux pour simplifier une législation devenue "illisible" : un socle de droits et principes fondamentaux garantis par la loi, les dispositions relevant des accords collectifs et les règles venant suppléer l'absence d'accord.
"Je souhaite que nous mettions en oeuvre cette nouvelle architecture dès la loi de 2016 dans certains domaines essentiels bien identifiés de notre Code du travail", a-t-il précisé.
"Le 28 octobre (...) nous indiquerons les orientations du projet de loi. Une seconde phase de concertation s'engagera à partir de là sur le projet de loi lui-même jusqu'à la fin de l'année", a-t-il ajouté.
SARKOZY ET LA CGT VISÉS
François Hollande a renvoyé dos-à-dos ceux qui critiquent le dialogue social et ceux qui refusent de négocier, visant sans les nommer Nicolas Sarkozy et la CGT, qui a boudé la conférence en raison des procédures lancées contre des salariés d'Air France soupçonnés d'avoir malmené des cadres de la compagnie lors de son dernier Comité central d'entreprise.
"Je n'accepterai jamais que des violences inexcusables qui ont été commises à Air France puissent être l'occasion de s'en prendre au syndicalisme dans son ensemble", a-t-il dit, une pique à l'adresse du président des Républicains qui a utilisé le mot 'chienlit' à propos de ces violences.
Quant à la CGT, "il est également commode, pour d'autres, de ne jamais s'engager à signer le moindre accord en espérant d'ailleurs que d'autres le feront à leur place, tout en dénonçant dans le même mouvement les insuffisances du dialogue social", a dit François Hollande.
Plus tôt, sur RTL, il avait réfuté tout risque d'explosion sociale, en réponse au secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.
"Le conflit à Air France ne résume pas l'état de la France", a dit le président, deux semaines après les violences.
"Nous devons vivre dans une société apaisée. Il y a toujours des conflit, toujours des confrontations, toujours des intérêts divergents. Comment devons-nous répondre ? Par de la violence ? Sûrement pas. Par de l'apaisement, et donc le dialogue."
Philippe Martinez a stigmatisé sur France Inter un dialogue social biaisé, déclarant que les négociations ne pouvaient se limiter à du "chantage : soit vous acceptez des reculs sociaux, soit on licencie !".
Présent à la conférence, le secrétaire général de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, a également fait part de critiques, estimant que "le Premier ministre est dans une posture d'autoritarisme social quand il considère que si on ne réforme pas comme il l'entend lui on fait du conservatisme".
(Avec Elizabeth Pineau et Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)