PARIS (Reuters) - L'ancien président François Hollande a conseillé mercredi au Parti socialiste d'éviter "l'autoflagellation", jugeant malvenu et trop tardif l'inventaire de son quinquennat récemment réalisé par l'actuel premier secrétaire, Olivier Faure.
Lors d'une rencontre avec des étudiants de Sciences Po à Paris, l'ancien chef d'Etat a aussi reproché à l'actuel pouvoir d'avoir négligé les corps intermédiaires, ce qui a contribué selon lui à déclencher l'actuelle crise des "Gilets jaunes".
Olivier Faure a dressé la semaine dernière un bilan sévère du quinquennat de François Hollande (2012-2017), qui a péché selon lui par une "absence de vision" et un éloignement du "socle de valeurs" de la gauche où des électeurs "se sont sentis trahis".
François Hollande a jugé "étrange" de faire cet inventaire "18 mois après" son départ de l'Elysée, "en pleine crise des 'Gilets jaunes'".
"Il y a une règle en politique : il ne faut jamais s'autoflageller. Les électeurs font très bien ce travail sans que vous ayez besoin de le faire à leur place", a-t-il dit.
"La gauche a toujours été divisée, je pense que c'est sa nature", a aussi déclaré celui qui dirigea le PS pendant plus de 11 ans. "Mais elle sait à des moments se rassembler", a-t-il poursuivi, à la condition d'avoir "une force autour de laquelle" se retrouver.
"Rassembler autour de la force principale, si tant est que le PS l'est encore" suppose selon lui d'"être clair sur les intentions, les projets et les propositions".
A l'approche du scrutin européen du 26 mai, Olivier Faure tente de réunir la gauche - communistes, écologistes, notamment - autour de "combats communs", alors que le PS est autour de 6% dans les sondages d'intentions de vote.
"Je préfère avoir une vision qui permet d'avoir 28% plutôt que celle qui fait 6%", a ironisé François Hollande en référence à son score du premier tour de l'élection présidentielle en 2017.
LE RÉFÉRENDUM, "UNE DRÔLE D'IDÉE"
Dans son discours et le débat avec la salle qui a suivi, l'ex-président a longuement analysé l'idée de social-démocratie, qui a selon lui un avenir à condition de répondre au triple défi de l'écologie, de la démocratie et de la lutte contre les inégalités.
François Hollande est aussi revenu sur la gestion par l'actuel pouvoir de la crise des "Gilets jaunes" qui secoue le pays depuis la mi-novembre.
"Les leçons de morale ne peuvent pas être entendues", a-t-il lancé à l'adresse d'Emmanuel Macron.
Une crise suppose selon lui de "réagir vite et au bon moment" et de "trouver des interlocuteurs".
La crise actuelle, à laquelle l'exécutif tente de répondre par l'organisation d'un "grand débat national" montre "combien le fait d'avoir négligé les corps intermédiaires pouvait être coûteux pour une nation", a aussi souligné François Hollande.
"Notre pays a comme exigence d'être représenté", a poursuivi l'ancien président, pour qui syndicats et associations sont autant de "délégués et de lanceurs d'alertes, de ceux qui viennent dire à un moment que dans une société, il y a danger."
François Hollande s'est montré sceptique quant à l'organisation de référendums réclamés par une partie des "Gilets jaunes", alors que le Royaume-Uni a choisi de quitter par ce biais l'Union européenne. "C'est une drôle d'idée de faire des référendums, je dis ça en passant", a-t-il dit.
Gourmand de joutes politiques, François Hollande a lancé des flèches à ses adversaires dont font partie Les Républicains, qui viennent de désigner François-Xavier Bellamy comme tête de liste aux européennes. "La droite qui choisit un candidat plus à droite que l'extrême droite", a-t-il commenté.
Il a aussi réservé une pique au leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui avait déclaré "la République, c'est moi" lors d'une perquisition au siège de son parti. Il est des partis non traditionnels où "le chef se prend pour la République, ça peut arriver", a-t-il plaisanté.
(Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)