PARIS (Reuters) - L'ONG Human Rights Watch dénonce mardi un harcèlement et des violences policières contre les 2.400 migrants sans abri, bloqués à Calais et qui tentent de passer en Grande-Bretagne en se glissant dans des camions.
L'organisation appelle le gouvernement à ouvrir une enquête pour mauvais traitements.
Les abus décrits à Human Rights Watch comprennent "des passages à tabac et des attaques au gaz lacrymogène alors que les migrants et demandeurs d'asile marchaient dans la rue ou se cachaient dans des camions", écrit-elle sur son site internet.
Le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, regrette que l'ONG n'ait pas pris la peine de vérifier les allégations de violences policières, ni saisi les nombreuses autorités de contrôle.
"La gravité des accusations publiques contre les forces de l'ordre formulées dans ce document aurait dû conduire l'association à entendre les responsables de la police sur des faits précis ou à saisir les services compétents", écrit-il dans un communiqué.
Les policiers et gendarmes sont soumis au contrôle de l'autorité judiciaire, d'autorités administratives indépendantes, comme le défenseur des droits, l'inspection générale de la police qui dispose d'une plate-forme dédiée, ou de la gendarmerie nationale, ajoute-t-il.
Human Rights Watch rejette l'argument du ministère selon lequel aucune plainte n'a été déposée, soulignant que les migrants, très méfiants à l'égard des autorités, refusent systématiquement d'entamer des poursuites.
"EXACTIONS DE ROUTINE"
L'ONG dit s'être entretenue avec 44 demandeurs d'asile et migrants à Calais, dont trois enfants, qui ont décrit "ce qui semble être des exactions de routine par des policiers".
Dix-neuf personnes, dont deux enfants, ont déclaré que la police les avait maltraitées au moins une fois.
Huit ont eu des membres fracturés ou d'autres blessures visibles, qui, selon leurs dires, ont été causées par la police à Calais et dans les environs. Vingt-et-une, dont deux enfants, ont confié que la police les avait aspergés de gaz lacrymogène.
Le préfet du Pas-de-Calais a déclaré que les blessures des migrants provenaient de leur tentative de passage vers l'Angleterre ou de bagarres avec d'autres migrants.
Mais l'ONG publie de nombreux témoignages d'hommes et de femmes surtout d'origine soudanaise, syrienne, erythréenne ou éthiopienne, disant avoir été passés à tabac.
Plus largement, Human Rights Watch juge la réponse humanitaire du gouvernement, qui a installé récemment un centre d'accueil de jour pour les migrants, "insuffisante et lente".
"Le 15 janvier 2015, seuls des services limités étaient disponibles sur le site jusqu'en avril 2015. D'après l'association Vie Active qui gère le centre, l'hébergement de nuit ne serait disponible qu'en mars 2015 et ne concernera que 100 femmes et jeunes enfants", écrit-elle.
L'ONG dénonce aussi le manque de places pour les demandeurs d'asile qui vivent dans les jungles avec ceux qui veulent passer en Angleterre.
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse)