par Gilbert Reilhac
STRASBOURG (Reuters) - Correction: bien lire "ex-Premier ministre" au deuxième paragraphe.
Jean-Claude Juncker, élu mardi par les eurodéputés à la présidence de la Commission européenne, a promis une "commission très politique" usant pleinement de son pouvoir d'initiative.
L'ex-Premier ministre luxembourgeois a obtenu la confiance du Parlement par 422 voix contre 250 voix. Il devait recueillir une majorité qualifiée de la moitié des eurodéputés, soit au moins 376 sur 751. Au total, 529 députés ont pris part au vote.
Il lui revient maintenant de composer son collège de commissaires à partir des candidatures soumises par les Etats. Cette nouvelle commission sera soumise au vote du Parlement européen avant son entrée en fonction prévue le 1er novembre.
Avant le vote, Jean-Claude Juncker, chrétien-social de 59 ans, s'est engagé à mener l'Union européenne sur la voie des réformes, de la croissance et de la justice sociale.
"La Commission n'est pas un comité technique. La Commission sera politique, elle sera très politique", a-t-il promis.
C'est la première fois que la candidature du président de la Commission européenne était soumise au vote du Parlement européen en vertu du Traité de Lisbonne.
Les eurodéputés, qui ne disposaient jusqu'à présent que du droit d'accepter ou de refuser en bloc le collège des commissaires, ont obtenu une application à la lettre du traité selon lequel le candidat est choisi "en tenant compte du résultat des élections européennes".
UNE EUROPE PLUS SOCIALE
Le Parti Populaire européen (PPE), fédération de partis de centre-droit, étant de nouveau arrivé en tête des élections de mai, son candidat, Jean-Claude Juncker, a ainsi été désigné par le Conseil européen, le 27 juin dernier.
Parmi les Vingt-huit, seuls le Royaume-Uni et la Hongrie se sont prononcés contre la candidature du Luxembourgeois, jugé trop fédéraliste.
Jean-Claude Juncker bénéficiait du soutien du PPE, du groupe libéral-démocrate et des Socialistes et démocrates, même si certains de ses membres, comme les socialistes français, ont affirmé qu'ils voteraient contre. Les Verts étaient partagés tandis qu'eurosceptiques et gauche radicale s'opposaient à sa nomination.
"L'Europe ne se construit pas contre les Etats ni contre les nations", a-t-il affirmé dans une de ses rares concessions aux eurosceptiques.
S'exprimant tour à tour en français, allemand et anglais, il a donné des gages à la droite mais surtout à la gauche dont une partie acceptait sa candidature à condition qu'il s'engage sur certaines de ses propositions.
Jean-Claude Juncker a promis de rendre l'Europe "plus concurrentielle" mais aussi plus sociale. "Les règles du marché intérieur ne doivent pas être placées plus haut que les règles sociales".
Il a invité les Vingt-huit Etats membres à réintégrer en leur sein le "29e Etat membre en train de se constituer, l'Etat dans lequel vivent ceux qui n'ont pas d'emploi".
"ERREURS"
Il a proposé un plan de relance de 300 milliards d'euros sur les trois années à venir, sans pour autant remettre en question l'orthodoxie budgétaire dictée par le Pacte de stabilité et de croissance.
Ces montants "seraient mobilisés par des investissements privés et publics. Nous pouvons le faire en mobilisant les fonds structurels et les instruments existants", a-t-il assuré.
Il proposé d'étendre jusqu'à 30 ans le bénéfice de la garantie jeune, un dispositif européen d'accompagnement des jeunes sans formation ni emploi réservé aux moins de 25 ans.
L'ancien président, durant huit ans, de l'Eurogroupe, a reconnu les "erreurs" commises dans la mise en œuvre des plans d'ajustement imposés à certains Etats défaillants.
"Avant qu'on applique un programme d'ajustement, je pense qu'il faut réaliser une étude d'impact très minutieuse", a-t-il affirmé eu égard aux conséquences sociales qu'ont eues ces programmes dans certains pays comme la Grèce.
Jean-Claude Juncker s'est aussi engagé à défendre la libre circulation des travailleurs –qui est "une chance, pas une menace"- et la signature du traité commercial transatlantique mais pas à n'importe quel prix.
L'eurodéputée Marine Le Pen, présidente du Front national, l'a vivement interpellé: "Vous dirigiez un paradis fiscal, vous voici à la tête d'un enfer européiste", a-t-elle lancé.
"Je remercie Mme Le Pen de ne pas voter pour moi. Je ne veux pas avoir l'assentiment de ceux qui rejettent, qui haïssent, qui excluent", a répliqué Jean-Claude Juncker.
(Edité par Sophie Louet)