par William James
LONDRES (Reuters) - Le Premier ministre britannique Boris Johnson s'est officiellement lancé mercredi dans la campagne en vue des élections générales anticipées du 12 décembre en comparant son rival travailliste Jeremy Corbyn à Josef Staline.
"Ils prétendent que leur haine ne vise que certains milliardaires et ils pointent du doigt des personnes avec une délectation et une vindicte que l'on n'avait plus vues depuis la persécution des koulaks par Staline", écrit-il dans le Daily Telegraph en évoquant la campagne menée par le dirigeant soviétique contre les paysans propriétaires de leurs terres.
"Ils détruiraient la base même de la prospérité de notre pays."
Le programme de sa journée prévoit dans un premier temps une visite protocolaire auprès de la reine Elizabeth. Il pourra ensuite formellement annoncer depuis sa résidence du 10, Downing Street la dissolution du Parlement et la tenue d'élections anticipées avant de mener un meeting de campagne du Parti conservateur durant lequel il répétera sa promesse de "réaliser le Brexit" dans les prochaines semaines.
Boris Johnson a obtenu la semaine dernière le feu vert de la Chambre des communes pour des législatives anticipées, appelant les électeurs britanniques aux urnes en décembre, une première depuis 1923.
Le scrutin doit permettre au Royaume-Uni de sortir de l'impasse sur le Brexit, alors que le dirigeant conservateur a réussi à obtenir le mois dernier un nouvel accord auprès des Européens mais a dû accepter que Bruxelles repousse la date du divorce de trois mois, au 31 janvier 2020.
"Je ne veux pas d'élections. Aucun Premier ministre ne veut d'élections anticipées, surtout pas en décembre. Mais en l'état nous n'avons tout simplement pas le choix - parce que c'est seulement en réalisant le Brexit dans les prochaines semaines que nous pourrons nous concentrer sur l'ensemble des priorités du peuple britannique", ajoute-t-il dans sa tribune que publie le Daily Telegraph.
Les enquêtes d'opinion créditent le Parti conservateur d'une avance confortable sur le Labour, mais les sondeurs préviennent que l'opinion est inhabituellement volatile.
L'issue du scrutin apparaît d'autant plus imprévisible que la question du Brexit a brouillé les appartenances partisanes, et donne aux petits partis l'occasion de venir bousculer les Tories de Boris Johnson et l'opposition travailliste menée par Jeremy Corbyn.
DÉPART DIFFICILE
Johnson espère obtenir une majorité suffisante au Parlement de Westminster pour faire ratifier l'accord de Brexit qu'il a négocié avec l'UE et sortir le Royaume-Uni du bloc à la fin décembre ou en janvier.
Mais la pré-campagne du parti Tory n'a pas été lancée de la meilleure manière: Jacob Rees-Mogg, ministre des Relations avec le Parlement dans le gouvernement sortant, a dû présenter des excuses pour avoir laissé entendre que les victimes du dramatique incendie de la Grenfell Tower, qui a fait 71 morts en juin 2017 à Londres, auraient dû faire preuve de bon sens en ignorant les recommandations des pompiers qui leur avaient donné pour instruction de rester dans leurs domiciles.
Mercredi, c'est le président du parti, James Cleverly, qui s'est retrouvé en difficulté après la diffusion par l'équipe de campagne de Johnson d'une vidéo reposant sur des extraits d'une interview accordée à la chaîne de télévision ITV par Keir Starmer, le "Monsieur Brexit" du Parti travailliste, grossièrement montée de façon à donner l'impression que le Labour n'a aucune réponse à apporter à la question de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.
La campagne du dirigeant conservateur veut faire passer le message que Corbyn cherche à bloquer le processus du Brexit en organisant un nouveau référendum, plus de trois ans après que les Britanniques se sont majoritairement prononcés pour une sortie de l'UE, et que le chef du Labour menace ainsi l'avenir du Royaume-Uni.
Corbyn a accusé mardi Johnson de chercher à tirer parti du Brexit pour imposer un "thatchérisme sous stéroïdes" qui nuirait à l'économie et aux droits des salariés britanniques. Il a dit vouloir négocier un nouvel accord de sortie avec l'UE et laisser ensuite les électeurs se prononcer sur cet accord.
(William James; Jean Terzian et Henri-Pierre André pour le service français, édité par Jean-Michel Bélot)