PARIS (Reuters) - Les députés français ont adopté mardi le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2018, le premier du quinquennat et de la législature.
Ce PLFSS, qui traduit plusieurs propositions faites par Emmanuel Macron pendant sa campagne pour la présidentielle, prévoit 5,2 milliards d'euros d'économies sur l'ensemble des dépenses de sécurité sociale, l'effort étant principalement concentré sur l'assurance maladie.
L'une des mesures phares de ce texte - et des plus contestées - fait basculer une partie du financement de la protection sociale des cotisations salariales vers la contribution sociale généralisée (CSG), dont le taux va augmenter 1,7 point.
Le PLFSS prévoit une transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse pérenne des charges patronales sur les bas salaires à partir de 2019.
D'ici là, l'Assemblée devrait adopter lors de la suite de la discussion du projet de loi de finances (PLF) un abaissement du taux de ce crédit d'impôt de 7% à 6% à compter du 1er janvier 2018.
La fin du régime social des indépendants (RSI) et son adossement au régime général - autre engagement de campagne d'Emmanuel Macron - figure également dans ce texte, qui prévoit une période transitoire de deux ans.
Sur le plan financier, ce PLFSS s'inscrit dans la perspective d'un retour à l'équilibre des comptes sociaux en 2020. Il prévoit une amélioration de trois milliards d'euros du solde global de la Sécurité sociale (régime général et Fonds de solidarité vieillesse, FSV) et un retour dans le vert du régime général en 2018.
La progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) a été fixée à 2,3% en 2018, contre 2,1% cette année.
Sur les autres branches de la Sécurité sociale, le PLFSS acte notamment une revalorisation du minimum vieillesse au 1er avril 2018, un abaissement de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje).
Il prévoit également une hausse importante du prix du tabac étalée sur trois ans, une augmentation des taxes sur les sodas ou encore une extension de l'obligation vaccinale pour les enfants en bas âge de trois à onze vaccins, à compter du 1er janvier.
Les groupes La République en marche (LREM) et MoDem ont voté pour ce PLFSS présenté par le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin et la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn.
Le groupe les Constructifs a majoritairement voté contre, quelques-uns de ses députés se sont abstenus.
Le groupe Les Républicains (LR) a voté contre tout comme ceux de gauche, celui de la Nouvelle gauche (exPS), de la France insoumise (LFI) et de la gauche démocrate et républicaine (GDR, PC).
Le PLFSS a été adopté par 354 voix contre 192.
Le Sénat examinera à son tour à partir du lundi 13 novembre ce projet de loi de financement pour la Sécurité sociale qui devrait être définitivement adopté par le Parlement début décembre.
Voici les détails des principales dispositions de ce PLFSS.
* HAUSSE DE LA CSG ET SUPPRESSION DE COTISATIONS SOCIALES
La hausse de 1,7 point du taux de la CSG - qui s'applique à l'ensemble des revenus, dont les pensions et l'épargne - ne concernera ni les allocations chômage ni les indemnités journalières. Elle est destinée à compenser la suppression de certaines cotisations salariales.
Pour les salariés du privé, la suppression de cotisations se fera en deux temps et portera sur les cotisations maladie et chômage, qui représentent 3,15% de la rémunération brute.
Pour les indépendants, le changement concernera les cotisations d'allocations familiales, maladie et maternité et se traduira par un gain de pouvoir d'achat pour les trois quarts d'entre eux.
A l'inverse des salariés du privé et de la majorité des indépendants, les fonctionnaires ne bénéficieront que d'une neutralisation de la hausse de la CSG - via la suppression de cotisations et la création d'une prime compensatoire - sans gain de pouvoir d'achat.
La hausse de la CSG concernera les 60% de retraités ayant les revenus les plus élevés, c'est-à-dire ceux dont la pension est au moins égale à 1.400 euros par mois pour une personne seule de plus de 65 ans. Les retraités les plus modestes, exonérés de CSG ou soumis à la CSG à taux réduit, ne seront pas concernés.
* TRANSFORMATION DU CICE
Le texte transforme, à compter de 2019, le Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) en allègement pérenne de 6% des cotisations sociales des entreprises pour les rémunérations n'excédant pas 2,5 fois le SMIC.
Le texte supprime également le crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS), instauré dans la loi de finances pour 2017 qui concernait le secteur de l'économie sociale et solidaire, en le transformant en réduction de cotisations patronales.
* FISCALITÉ DES ACTIONS GRATUITES
Un amendement du groupe LREM a allégé la fiscalité sur les actions gratuites distribuées dans les entreprises, ramenant la contribution patronale de 30% à 20%.
Cette disposition, qui efface une mesure prise contre l'avis du gouvernement dans le cadre PLF 2017, rétablit le régime fiscal instauré par la loi Macron de 2015.
* REPORT DE LA GÉNÉRALISATION DU TIERS PAYANT
La mise en place du tiers payant généralisé, prévue au 30 novembre 2017 mais jugée "irréaliste" dans un récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), a été reportée via un amendement gouvernemental.
Actuellement en vigueur pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire, les patients souffrant d'affections de longue durée et les femmes en congés maternité, ce dispositif permet d'éviter aux patients d'avoir à avancer leurs frais de santé.
Sa généralisation va faire l'objet d'une concertation.
* SUPPRESSION DU RSI
Le texte supprime le régime social des indépendants (RSI) et prévoit son adossement au régime général, avec une période transitoire de deux ans.
* MESURES DE PRÉVENTION
Le PLFSS entend renforcer la lutte contre la tabagisme en instaurant une hausse de près de trois euros en trois ans du paquet de cigarettes. La taxe sur les boissons sucrées, dite "taxe sodas", a également été durcie via un amendement de la commission visant à accentuer la lutte contre l'obésité.
L'obligation vaccinale pour les jeunes enfants est étendue de trois à huit vaccins. En plus des vaccinations contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, déjà obligatoires, les enfants nés à partir du 1er janvier 2018 devront désormais également être vaccinés contre la coqueluche, la bactérie Haemophius influenzae de type b, l'hépatite B, le pneumocoque, le méningocoque C, la rougeole, les oreillons et la rubéole.
Les onze vaccins seront obligatoires pour toute admission en collectivité (crèche, garderie, colonie de vacances, école) mais il n'y aura pas de sanction pour les parents refusant de vacciner leur enfant.
* ÉVOLUTION DES ALLOCATIONS FAMILIALES
La prestation d'accueil au jeune enfant (PAJE) va baisser de 15 euros par mois pour les naissances enregistrées à partir du 1er avril 2018. Cette mesure, vivement dénoncée par tous les groupes, a été votée par le seul groupe LREM.
Une augmentation de 30% de l’aide à la garde d’enfants versée aux familles monoparentales a également été votée.
(Emile Picy, édité par Yves Clarisse)