PARIS (Reuters) - Le gouvernement a exclu publiquement mercredi de mettre fin cette année au gel des tarifs des péages d'autoroutes, à la surprise des sociétés concessionnaires avec lesquelles les négociations ne sont pas terminées.
"Il n'y aura pas d'augmentation de tarifs pour l'année 2015", a déclaré la ministre de l'Ecologie Ségolène Royal à l'issue du conseil des ministres.
Le Premier ministre Manuel Valls a lui aussi déclaré que le plan de relance autoroutier - 3,2 milliards d'euros de travaux pris en charge par le secteur privé en échange d'un allongement des concessions - et les 500 millions d'euros d'investissement supplémentaires que consentiraient les sociétés d'autoroutes s'entendaient "sans hausse des tarifs de péages en 2015".
Les tarifs devaient théoriquement augmenter de 0,57% en moyenne en France au 1er février, selon la formule contractuelle en vigueur, mais le gouvernement a décrété un gel en attendant l'issue des négociations en cours sur le régime global des autoroutes.
Les concessionnaires Vinci, Eiffage ou Abertis, qui réclament trois milliards d'euros d'indemnisation, notamment pour ce gel, ne sont pas hostiles à une modération des péages, mais à condition qu'ils puissent lisser les hausses dans le temps.
A l'Assemblée nationale, lors de la séance des questions d'actualité, Ségolène Royal est allée plus loin en excluant une compensation en 2016 du gel de cette année.
"(Les) sociétés autoroutières (...) sont appelées à contribuer, pour protéger les consommateurs, c'est-à-dire les automobilistes, à renoncer à la hausse des tarifs pour l'année 2015 sans rattrapage pour l'année prochaine", a-t-elle dit.
L'Association des sociétés françaises d'autoroutes (Asfa) a refusé de faire un commentaire, soulignant que "les discussions continuent".
Les autoroutes font l'objet depuis l'automne dernier d'un bras de fer entre les pouvoirs publics et les opérateurs privés sur la question du rééquilibrage d'un régime dénoncé par l'Autorité de la concurrence comme une rente indue.
Un groupe de travail parlementaire chargé du dossier, après de vifs débats, a appelé début mars à une levée rapide du gel des péages afin que le report des augmentations prévues n'alourdisse pas trop la note les années suivantes. Il a également écarté la menace d'une résiliation des contrats de concession issus de la privatisation de 2006 en raison de son coût potentiel pour l'Etat.
Les négociateurs doivent s'entendre sur l'évolution future des tarifs - jusqu'ici, la date du 1er juin était régulièrement citée - et sur la définition des niveaux de trafic en fonction desquels les concessionnaires verraient la durée de leurs concessions rabotée ou allongée.
Les concessionnaires sont également prêts à participer davantage au budget de l'AFITF (Agence de financement des infrastructures de transport de France) à la condition que cette contribution soit ponctuelle et pour solde de tout compte.
Manuel Valls et Ségolène Royal ont annoncé mercredi une participation de 500 millions d'euros supplémentaires dans les infrastructures et les projets de transport, dont 300 millions à l'AFITF et 200 millions versés sur un compte de la Caisse des dépôts pour financer des projets de transport innovants, comme dans l'autopartage.
Mais les deux ministres ont évoqué une contribution sur trois ans, alors que les concessionnaires l'envisageaient jusqu'ici sur la durée des concessions, qui courent jusqu'aux années 2030.
(Gilles Guillaume, Dominique Vidalon, Yann Le Guernigou et Jean-Baptiste Vey, édité par Dominique Rodriguez)